PRESIDENTIELLE EN GUINEE : Un Français en quête de légitimité au palais Sékhoutouréya

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Ce lundi, 3 novembre, Mamadou Doumbouya a, officiellement, déposé sa candidature pour la prochaine élection présidentielle du 28 décembre. Pressentie au lendemain de son accession au pouvoir, celle-ci n’a pas dérogé à la règle dans un continent africain où la diabolisation des dirigeants au pouvoir octroie, désormais, un passe-droit à tout militaire se pensant capable de mener les masses vers des horizons meilleurs.

Mais, dans le cas de la République de Guinée, les choses vont au-delà de la complexité habituelle de voir un putschiste, sorti de nulle part, postuler à la fonction de chef d’Etat, à travers un processus démocratique en bonne et due forme. En effet, Doumbouya est un militaire français, formé en France, et marié à une ancienne camarade d’armes française. Une maréchale de logis de la gendarmerie française. Ainsi, son allégeance et son infériorité vis-à-vis de tout locataire de l’Elysée ne doivent faire l’objet d’aucun doute (sur notre photo, Mamadi Doumbouya avec son compatriote Emmanuel Macron) .

En d’autres termes, il n’existe pas de scénario dans lequel Doumbouya puisse mettre les intérêts de la Guinée avant ceux de la France. C’est précisément pour cette raison qu’il a, jusqu’à présent, bénéficié d’un traitement de faveur venant de l’Elysée, éternel dénonciateur des changements anticonstitutionnels qui ne l’arrangent pas, mais aussi, de la CEDEAO, qui accrédite les accusations, à son encontre, d’être inféodée à Paris dans son fonctionnement. 

Même en Guinée-Bissau où Umaro Sissoco Embalo a entrepris de grossières manœuvres pour se maintenir au pouvoir, notamment, en paralysant l’appareil institutionnel du pays, la CEDEAO a effectué une démarche pour tenter de préserver l’ordre démocratique. Cette démarche s’étant soldée par une expulsion, manu militari, de la délégation envoyée sur place, elle a, tout de même, le mérite d’avoir été initiée. Pour Doumbouya par contre, c’est le vide et le silence total.

Son ami, Julius Maada Bio, qui a récupéré la présidence tournante de la CEDEAO, en juin dernier, et qui avait suscité la controverse en devenant le premier chef d’Etat à lui rendre visite à Conakry après le coup d’état du 5 septembre 2021, n’a pas daigné aller le rencontrer de nouveau, malgré que leurs deux pays sont limitrophes, préférant plutôt s’attaquer au morceau dur de l’Alliance des Etats du Sahel (AES). Comme pour rappeler que le copinage entre leaders a ses avantages. 

Mamadi Doumbouya avec son épouse Lauriane Doumbouya est passé de lieutenant-colonel à général d’armée (5 étoiles) en l’espace de 4 ans : « Vive les coups d’état », peut-il chanter après avoir gagné sur toute la ligne sur le pouvoir d’Alpha Condé.

En résumé, les Guinéens ne peuvent et ne doivent rien attendre de personne, surtout pas des instances régionales, concernant le problème Mamadi Doumbouya. Démasqué en plein jour dans son entièreté, il n’a même plus besoin de cacher ses affiliations, ni ses tendances autoritaires. Maintenant qu’il vise la légitimité pour mieux asseoir son pouvoir au palais Sékhoutouréya, il appartient aux Guinéens de décider s’ils veulent qu’un Français préside à leurs destinées.

Paul-Patrick Tédga MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC

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