RUSSIE-AFRIQUE : Pourquoi Sergueï Lavrov était à Kampala !

Le Sommet Russie-Afrique qui était envisagé courant décembre à Addis Abeba n’aura plus lieu. En effet, le mois de décembre sera particulièrement chargé en Afrique avec le Sommet Etats-Unis/Afrique que Joe Biden a d’ores et déjà calé avec l’Union africaine (UA) du 13 au 15 décembre à Washington. Après, il y a les fêtes de fin d’année. C’est pourquoi en concertation avec les ambassadeurs africains auprès de l’UA, ce rendez-vous a été décalé en 2023. Mais il n’aura plus lieu en Afrique mais en Russie. Si le voyage du chef de la diplomatie russe dans les trois pays (Egypte, Congo-Brazzaville et Ethiopie) peut s’expliquer aisément au nom des relations entretenues depuis des lustres avec Moscou de l’ère soviétique, le voyage en Ouganda échappe à cette analyse. En effet, l’Ouganda serait sur le point d’envoyer des troupes épauler le gouvernement de transition malien dans leur lutte contre le djihadisme. Et ce, aux côtés des Russes. C’est exactement le même schéma en Centrafrique où les troupes rwandaises sont venues à la rescousse de l’armée centrafricaine, aux côtés des Russes, pour empêcher la rébellion de Bozizé de prendre le pouvoir par la force. Le général Paul Kagamé et l’ex-guérillero Yoweri Museveni, ne sont-ils pas les monnaies de la même pièce, qui furent utilisés pour jeter le maréchal Mobutu au profit de Laurent Désiré Kabila dans l’ex-Zaïre ? Mais, parfois, leurs intérêts divergent. Lundi 11 juillet, le ministre ougandais de la Défense, l’honorable, Vincent Bamulangaki Ssempijja, s’est rendu à Bamako pour des rencontres au sommet avec le colonel-président, Assimi-Goïta, et le ministre de la Défense et des Anciens combattants, le colonel, Sadio Camara. Ont aussi participé à la rencontre, le secrétaire général du MDAC, le général de division, Sidiki Samaké, l’inspecteur général des Armées et Services, le général de brigade, Bréhima Diabaté et plusieurs autres responsables militaires du MDAC. Le ministre ougandais avait aussi à ses côtés plusieurs collaborateurs de niveau équivalent. L’enjeu terroriste auquel le Mali fait face est au centre des préoccupations de l’Ouganda et l’ex-guérillero est prêt à apporter son concours pour l’enrayer du mieux qu’il pourra. Et ce dans tous les domaines. Un accord bilatéral sera bientôt signé entre les deux pays pour formaliser cette coopération naissante. Sous la haute supervision du grand-frère russe. C’est pourquoi Sergueï Lavrov s’est offert cette escapade à Kampala où lors de la conférence de presse finale, l’ex-guérillero ne s’est pas empêché de dénoncer les raisons de la généralisation du djihadisme dans le Sahel (après l’assassinat de façon gratuite par l’OTAN de Kadhafi). Les mêmes qui demandent, aujourd’hui, à l’Afrique de condamner l’agression de la Russie en Ukraine oubliant très vite ce qu’ils ont fait en Libye où l’Afrique paie des erreurs qu’elle n’a pas commises. Notons pour terminer que l’ex-guérillero est un anti-colonial primaire bien que lui-même soit arrivé à la tête de l’Ouganda grâce aux Américains sous l’administration Bill Clinton, tout comme Isaïas Afeworki de l’Erythrée et Meles Zenawi de l’Ethiopie. En dehors de ce dernier qui a rendu l’âme après 20 ans de pouvoir sans partage (avec la complicité de Oncle Sam), Afeworki et Museveni eux, se sont totalement affranchis de l’encombrante tutelle de Washington. L’ex-guérillero par exemple a accueilli François Bozizé et ses proches à Kampala où il leur offre le gîte et le couvert. Il était très fâché de la façon dont les Français avec le concours du président Idriss Déby Itno, l’ont jeté après l’avoir pressé comme un citron, quand ils ont vu qu’ils ne servaient plus leurs intérêts. Mais, paradoxalement, Bozizé cherche à revenir au pouvoir avec l’aide des (mêmes) Français, au grand étonnement de Yoweri Museveni. Cela dit, son quartier général est toujours à Kampala. Pour terminer, ce n’est pas inintéressant de savoir que la personne qui empêche le retour de Bozizé et de ses rebelles à Bangui, ce sont bien les soldats rwandais et russes de la société Wagner. L’Afrique parfois est très (très) compliquée à comprendre.

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