COTE D’IVOIRE : Boycotter la farce électorale de dimanche ne suffira pas

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Laurent Akoun et Aboudramane Sangaré appellent les Ivoiriens à s’opposer, par tous les moyens légaux, à la présidentielle du 25 octobre 2015 qu’ils jugent truquée d’avance. Mamadou Koulibaly et Essy Amara, quant à eux, ne préconisent rien d’autre qu’un boycott. Pourquoi ? Parce que, selon eux, les jeux sont déjà faits, c’est-à-dire? que les Ivoiriens n’auront droit qu’à une parodie d’élection. Pour eux et pour d’autres Ivoiriens, un éventuel “non” massif ouvrirait la voie à une période de transition que certains envisagent sans Dramane Ouattara. Massif ou non, un boycott changerait-il quelque chose dans le diabolique agenda de celui qui, en octobre 2010, ne fut pas élu, mais, installé dans le sang par les bombes de la coalition franco-onusienne ? En quoi un faible taux de participation à cette comédie électorale l’affecterait-il ? Bref, cela l’intéresse-t-il que de nombreux électeurs ivoiriens s’abstiennent de jeter leur bulletin dans l’urne ? De plus, étant coutumier du faux, ne pourrait-il pas transformer 10% de participation en 60% ? La vraie question, à mon avis, n’est donc pas celle de savoir si peu ou très peu d’Ivoiriens iront voter, ce dimanche. La vraie question est celle-ci : que devons-nous faire pour qu’il n’y ait d’élection pour personne le 25 octobre 2015 ? Quels mécanismes devons-nous trouver pour bloquer toute activité dans le pays avant ou à partir du 25 octobre ? Quels produits comptons-nous boycotter et, donc, quels sacrifices sommes-nous prêts à consentir, pour que rien ne marche dans le pays ? Car nous devons avoir conscience que, tant que les Français (gouvernement et entreprises), indéfectibles soutiens de Dramane, ne seront pas frappés au portefeuille, tant que nous ne leur ferons pas perdre de l’argent, ils continueront à fermer les yeux sur la dictature et le rattrapage ethnique de Dramane Ouattara. Je l’exprime autrement : si le pays est calme, parce que nous avons peur de mourir ou parce que nous craignons de perdre le semblant de travail que nous avons ici ou là, pourquoi voulons-nous que Hollande, Ban Ki-moon et autres, se bougent et interpellent celui qui leur permet de voler nos richesses ?

“Aussi longtemps que tu accepteras l’oppression, tu seras opprimé ; aussi longtemps que tu accepteras l’exploitation, tu seras exploité”, affirme l’historien noir-américain, Runoko Rashidi. Il en résulte que le problème qui se pose, présentement, n’est pas tant la prétendue puissance de l’oppresseur ou de l’exploiteur que la résignation de l’opprimé ou de l’exploité. Et l’erreur que nous commettons, fréquemment, c’est d’oublier que les tyrans ne sont forts que devant les peuples résignés et courbés. En d’autres termes, nos souffrances ne prendront fin que le jour où nous comprendrons que celui qui a, véritablement, la puissance et la force, c’est le peuple. Car, lorsque celui-ci prend conscience de sa force, lorsqu’il se met debout, lorsque il est uni et en ordre de bataille, il est comparable à un fleuve en crue. Il est alors capable de tout balayer ou de tout emporter sur son passage. Et les tyrans n’ont pas d’autre choix que de trembler et de prendre la poudre d’escampette. Je ne parle pas de quelques individus mais du peuple. C’est ce que le peuple burkinabè nous a, magistralement, montré, fin octobre 2014, contre le sanguinaire, Compaoré, et en septembre 2015, face à Diendéré et sa bande de petits voyous. En un mot, je veux dire que seul un soulèvement populaire peut chasser, aujourd’hui, Dramane Ouattara. Cela suppose que les Ivoiriens acceptent de rendre le pays ingouvernable. Cela suppose, également, que Kouadio Konan Bertin et Kouadio Konan Syméon emboîtent le pas à Koulibaly, Essy et Banny en se retirant de cette farce électorale que nos guides religieux, chefs traditionnels et rois n’ont pas jugé bon de dénoncer. Comme si Dieu et les ancêtres avaient, déjà, donné leur bénédiction à une entreprise dont le moins que l’on puisse dire, est qu’elle est autant malhonnête que criminelle. Cela suppose, enfin, que les leaders de l’opposition arrêtent de tergiverser et de privilégier leurs intérêts personnels.

Tout a une fin et la vie, telle une roue, tourne. La dictature de Dramane passera, elle aussi, et le peuple ivoirien demandera des comptes à tous ceux qui auront soutenu, activement, ou par le silence, ce régime violent, malfaisant et incompétent. Ils devront subir le même sort que les partisans du Maréchal Pétain après la libération de la France. Qu’on ne compte pas sur moi pour que leur soit accordé un quelconque pardon. KKB et KKS peuvent, donc, se racheter, encore, s’ils veulent échapper demain à la colère du peuple. Nous sommes comme à la croisée des chemins : ou bien nous osons poser le geste qui sauvera notre pays, c’est-à-dire, le guérira (enfin ?) de la violence et de la tricherie qui lui ont été imposées depuis 1990 par Dramane ouattara avec la complicité de certains Ivoiriens, qui ne pensent qu’à remplir leur panse, ou bien nous nous contentons de ne pas prendre part à un scrutin dont le vainqueur est déjà connu. Que choisirons-nous ? Pour moi, un boycott ne sera pas suffisant. Nous devons faire plus que boycotter. En clair, c’est tout le pays que nous devons bloquer ou paralyser, c’est l’élection frauduleuse du 25 octobre que nous devons empêcher. Aujourd’hui plus que jamais, le pays nous appelle et il nous appelle à ne pas l’abandonner entre les mains d’une bande de bandits et d’ imposteurs.

Jean-Claude Djereke
Enseignant aux Etats-Unis

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