Françafrique : A l’origine de l’immigration ?

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Exit Nicolas Sarkozy le « président sortant ». Place à François Hollande le « président normal ». Le propos peut faire sourire. La situation n’est mal-heureusement pas drôle. François Hollande a été élu, président de la République française, avec 51,6% des voix. Dix sept ans après François Mitterrand, la Gauche est à nouveau au pouvoir. C’est un événement exceptionnel que vit la France. La comparaison s’arrête là. Car en prenant ses fonctions le 15 mai, le nouveau chef de l’Etat trouve une France en piteux état : ses comptes sont tous dégradés, le chômage ne cesse d’augmenter, la perte du pouvoir d’achat ne fait que s’accentuer, le discours d’une partie de ses hommes poli-tiques flirte avec le racisme, la xénophobie s’est banalisée. Il ne fait pas bon d’être immigré en France, par les temps qui courent.

Je ne découvre pas seulement maintenant, que les trains n’arrivent pas à l’heure. C’est depuis la campagne de 2007 que le discours politique a vraiment dévié en France. Alors que sa politique sécuritaire Place Beauvau (Ministère de l’Intérieur) avait enflammé les banlieues, Nicolas Sarkozy se permettait de lancer des slogans du genre « Aimez la France ou quittez-la » à tous ces jeunes qui, en souvenir de sa politique répressive, ne voulaient pas de lui à l’Elysée. Cette curieuse manière de répondre aux préoccupations de ces jeunes des banlieues, Français comme lui, dans la grande majorité, aura été sa ligne de conduite durant tout son quinquennat. Toujours diviser. Aujourd’hui, les séquelles profondes qu’il laisse dans la société française sont irréversibles. Après avoir pourri le pays, Sarkozy a aussi quitté l’UMP, le parti qu’il a présidé pendant tout son quinquennat, en le laissant dans une situation complexe où certains élus appellent ouvertement à des ententes (antirépublicaines) pendant les élections législatives, de juin 2012, avec le Font national de Marine Le Pen. Où va-t-on ? Franchie dans le dis-cours, la ligne rouge risque de l’être à cet-te occasion.

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J’évoque ce sujet douloureux pour nous autres étrangers qui avons choisi de vivre en France, où on nous rend la vie plus difficile chaque jour qui passe, parce que le nouveau président veut aller dans un sens différent, sans nier les problèmes qui existent, mais en les affrontant différemment. « Je romprai avec la Françafrique », a déclaré François Hollande dans une interview exclusive accordée à Afrique Education (numéro 347 du 1er au 15 mai 2012). S’il respecte cet engagement, il aura vu juste parce que la solution au problème de l’immigration africaine en France se trouve à ce niveau. Pourquoi les Africains viennent-ils (ou cherchent-ils à venir) en masse en France ? Parce qu’ils ne peuvent plus vivre convenablement dans leur pays où rien ne marche. Pas de travail, pas de santé, pas d’éducation, pas de perspectives même pour les plus diplômés. Conséquence : pour ne pas mourir de faim, ils sont prêts à traverser la Méditerranée même à la nage. La situation de ces Africains candidats à l’aventure en Europe aurait peut être été différente si la bonne gouvernance dans leur pays était une réelle préoccupation. Tel n’est pas toujours le cas. Certains dirigeants africains n’ont pas peur du suffrage universel. Les élections pour eux ne sont qu’une formalité administrative destinée à répondre aux attentes de la communauté internationale : on n’a pas peur d’être sanctionné par son mauvais bilan mais on va aux élections pour ne pas s’attirer le courroux des bailleurs de fonds. Et cette fameuse communauté internationale est un monstre sans tête où les règles s’appliquent à la tête du client. C’est ainsi que la France officielle peut soutenir le bon sens prôné par la communauté internationale. Mais par derrière, la France officieuse, avec ses réseaux parallèles qui agissent en bonne intelligence avec la France officielle, viendra torpiller ces bonnes résolutions prises avec la communauté internationale. Autrement dit, la France présente deux visages : une France qui parle aux Nations-Unies où elle défend les valeurs de liberté et d’humanisme. Et une autre qui agit à travers des initiatives privées d’individus qui ont pignon sur rue auprès de la France officielle. Voilà pourquoi dans certains pays africains, il est tout à fait avantageux pour un chef d’Etat d’avoir plu-tôt des bons liens avec la France officieuse (la France des réseaux d’influence), ce qui lui garantit une tranquillité au sens plein du terme, avec des chances d’être protégé par les dirigeants de la France officielle. Voilà la raison pour laquelle certains dirigeants africains n’ont pas besoin de présenter un bon bilan pendant la campagne électorale pour se faire réélire. Pour survivre politiquement, Ils savent que leur salut passe par Paris où ils ont intérêt à satisfaire les réseaux de la France officieuse plutôt que leur propre peuple. Ainsi fonctionne la Françafrique à qui François Hollande a déclaré la guerre. Après François Mitterrand en 1981, on lui souhaite Bonne Chance en 2012 !

J’évoque ce sujet parce que Nicolas Sarkozy avait parlé de « rupture » en 2007. Au lieu de la faire, il a insulté l’Afrique, en juillet 2007, à Dakar, dans l’une de ses prestigieuses universités. Il ne s’est pas arrêté en si mauvais chemin. Il a poursuivi, tous les jours, en stigmatisant les immigrés, en France, alors qu’il était le président de la République, oubliant au passage que cette immigration en France, est directement le résultat de sa non-rupture de la Françafrique qu’il avait annoncée au début de son mandat.

C’est à ce niveau que je trouvais l’ancien président démagogue. Il soutenait les mauvais dirigeants africains et, en même temps, il interdisait aux Africains qui cherchent à fuir leur mauvaise politique dans leur pays, à venir s’installer en France : 5 lois sur l’immigration en 5 ans à l’Elysée. Je pense qu’il serait difficile même à l’extrême-droite de battre un tel record. On se demande à quelle fin ? Puisque malgré tout, le Front national a obtenu près de 18% le 22 avril, soit près du double de son score en 2007 (10,44%).

Il faut que François Hollande aide les Africains à rester dans leurs pays. Ils ne risquent pas leur vie en exil par amusement ou par simple goût de l’aventure. Car nous savons bien que sur cette belle vieille terre qu’est le monde, chacun est toujours mieux chez soi.

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