FRANCE-COTE D’IVOIRE : Ouattara souhaite le soutien de Macron pour un troisième mandat

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La visite que le jeune président français effectue en Côte d’Ivoire est économique, mais, surtout, politique. On passe outre le fait que les deux présidents vont relancer leur stratégie pour retarder le plus longtemps possible l’entrée en service de la monnaie ECO au sein de la CEDEAO, Ouattara n’ayant pas pu imposer le F CFA aux géants du Nigeria et du Ghana, mais, ce voyage permet, aussi, au président ivoirien de demander, formellement, l’appui politique de son homologue et ami afin que son inévitable candidature pour un troisième mandat à la tête du pays, ne soit pas un moment fâcheux pour la paix et la stabilité en Côte d’Ivoire. Si la Côte d’Ivoire doit justement préserver cette paix et cette stabilité (précaires), Macron devrait, fortement, le décourager. Mais le fera-t-il ?

Après avoir fêté Noël avec les soldats français basés à Abidjan, Emmanuel Macron va chercher samedi à renforcer les relations franco-ivoiriennes, en privilégiant la jeunesse et le sport, nouvelles priorités de la France en Afrique.

Le président français débute sa journée en inaugurant une « agora » sportive dans le quartier populaire de Koumassi, à Abidjan, en compagnie de l’ex-footballeur, Didier Drogba, idole de l’Olympique de Marseille (comme Emmanuel Macron), et de la championne olympique de judo, Priscilla Gneto, née en Côte d’Ivoire. Ca, c’est côté people, qui cache bien les dossiers importants à traiter par les deux hommes.

Le chef de l’Etat français passera une partie de la journée en compagnie de son homologue, Alassane Ouattara, qui s’est, déjà, rendu à six reprises à Paris depuis le début du quinquennat. Essentiellement, pour faire des ajustements par rapport à leur défense commune du F CFA qui subit des assauts des peuples d’Afrique en faveur de son remplacement par une monnaie authentiquement africaine. C’est ainsi que l’ECO est né en Afrique de l’Ouest malgré leurs multiples contacts pour le contrer. Maintenant, il faut tout faire pour retarder son entrée en fonction. Les deux chefs d’Etat vont en parler. Loin des oreilles indiscrètes. En tête à tête.

De source diplomatique et même si cela ne fera probablement pas l’objet d’annonce, Emmanuel Macron va aborder avec son hôte l’épineux dossier de l’élection présidentielle prévue en octobre 2020 en Côte d’Ivoire.

Ouattara, après avoir modifié la constitution, manœuvre pour se représenter. L’opposition n’est pas d’accord. Conséquence, la Côte d’Ivoire est à nouveau en danger.

Agé de 77 ans, M. Ouattara a annoncé qu’il serait candidat si ses rivaux historiques, les ex-présidents Laurent Gbagbo et Henri Konan Bédié, se présentaient. Or, Bédié sera bel et bien candidat. Et ce n’est que le retour de l’ascenseur car les deux hommes avaient passé des accords à ce sujet. Bédié a, par la suite, favorisé l’élection de Ouattara en 2010 et sa réélection en 2015. Maintenant que Bédié demande le soutien de Ouattara, ce dernier change de discours. Un homme d’Etat change-t-il, ainsi, la parole donnée comme le vent du désert change de direction ?

Dix ans après la crise post-électorale de 2010-2011 qui avait fait 3.000 morts, la période qui s’ouvre s’annonce tendue. Les élections municipales et régionales de 2018 avaient été marquées par de nombreuses violences et des fraudes. Le camp Ouattara est passé en force dans de nombreuses circonscriptions.

De source diplomatique, Emmanuel Macron devrait tenter de convaincre Alassane Ouattara de ne pas se laisser attirer par « les sirènes d’un troisième mandat ». Mais attention à la diplomatie française. Elle a toujours deux fers au feu c’est à dire qu’elle a l’habitude de soutenir une chose et son contraire en Afrique.

Le président français, qui répète souvent que la France ne peut pas lutter seule contre le djihadisme au Sahel, va par ailleurs relancer un projet qui lui tient à cœur : la construction de l’Académie internationale de lutte contre le terrorisme (AILCT), près d’Abidjan.

Il avait dévoilé ce projet en 2017 lors du Sommet UE-Afrique, avec l’ambition de faire de cette académie un centre de formation de référence pour l’Afrique de l’Ouest, regroupant à la fois une école pour des cadres et un camp d’entraînement.

Cette académie est la bienvenue. Car après avoir fait assassiner Kadhafi, ce qui a permis la libération des djihadistes qu’il confinait en Libye, la France de Nicolas Sarkozy (en 2011) et de Macron aujourd’hui, doit tout faire pour le retour de la paix dans le Sahel et la fin du djihadisme.

Un autre dossier qui pourrait être relancé est celui du métro d’Abidjan, un projet titanesque de 1,5 milliard d’euros financé par le trésor français (c’est-à-dire par le F CFA que défend tant le président de Côte d’Ivoire), dont Emmanuel Macron avait posé la première pierre en 2017. Depuis, le dossier a évolué mais les travaux n’ont pas commencé. Le F CFA devant disparaître dans les prochains mois, quid de ce crédit qui est sensé être financé par une monnaie en voie de disparition.

Accompagné de son épouse Brigitte et de plusieurs ministres, Emmanuel Macron terminera sa deuxième visite en Côte d’Ivoire en se rendant dimanche à Bouaké, la deuxième ville du pays (notre photo). Avant de faire, sur la route du retour à Paris, une escale rapide au Niger consacrée à la crise sécuritaire au Sahel.

A Niamey, un autre dossier tout aussi important l’attend : le double jeu de Barkhane dans le Sahel dont les peuples du Sahel demande dare dare le rappel en France. Même si, officiellement, dans son interview aux confrères de RFI et de France 24, il y a deux jours, Mahamadou Issoufou a tenté de calmer le jeu.

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