TANZANIE : Un Sommet africain sur le développement du capital humain pour rien ou simplement passé inarperçu

Date

Alors que le Sommet Russie-Afrique de Saint-Pétersburg et le putsch militaire au Niger faisaient la une de l’actualité internationale, le Sommet des chefs d’Etat africains sur le développement du capital humain de Dar se Salam, qui s’est déroulé les 25 et 26 juillet, est, quant à lui, quasiment, passé inaperçu. 

Co-organisé avec la Banque mondiale, l’événement a, pourtant, mobilisé 2 300 personnes, 1 000 d’entre elles étant issues de 44 nations africaines, et ayant effectué le déplacement dont les présidents, William Ruto du Kenya, Julius Maada Bio de la Sierra Leone, Filipe Nyusi du Mozambique, Andry Rajoelina de Madagascar, Lazarus Chakwera du Malawi, Hussein Ali Mwinyi du Zanzibar et Carlo Vila Nova de Sao Tomé-et-Principe, pour discuter des enjeux socio-économiques pour l’Afrique de la croissance rapide de sa population en âge de travailler (sur notre photo la présidente de Tanzanie Samia Suluhu Hassan coorganisatrice du Sommet avec la Banque mondiale). Précisons qu’au même moment, les 27 et 28 juillet, se tenait le 2e Sommet Russie-Afrique, à Petersburg, sous la présidence effective du président, Vladimir Poutine. Simple coïncidence des dates ou volonté manifeste de torpiller le Sommet des Russes, ennemis jurés du camp occidental ? Dans tous les cas, chaque chef d’Etat africain était sommé de choisir son camp et de clarifier sa position idéologique.

Si rien de vraiment nouveau n’a été dit au cours de ce rendez-vous, les leaders présents ont, tout de même, convenu de formaliser et signer la « Déclaration de Dar es Salam », un document recensant leurs engagements vis-à-vis du développement du capital humain en Afrique, en particulier, en matière d’accès à un système éducatif et de santé de qualité. Il s’agira pour les gouvernements africains de trouver des solutions communes pour permettre au continent de capitaliser pleinement sur le potentiel de productivité contenu dans les jeunes. On a besoin de dire : tout ça pour ça ? Etait-il nécessaire de convoquer un Sommet de chefs d’Etat pour renouveler l’utilité de l’investissement dans les secteurs sociaux de la santé et de l’éducation ? Encore fois, l’objectif était de faire échouer le Sommet Russie-Afrique qui a réuni 17 chefs d’Etat contre 29 en 2019, à Sotchi. La bouteille étant à moitié vide ou à moitié pleine, chacun se fera sa propre religion.

Confrontés au chômage et au sous-emploi, les jeunes Africains préfèrent souvent tenter leur chance à l’étranger, ne sachant pas que la vie n’y est pas forcément meilleure, et ne mesurant pas les pertes inimaginables pour leurs pays d’origine. Pour mettre un terme à cet exode, les pays africains doivent leur proposer des alternatives, et ne plus les abandonner à eux-mêmes. Cela peut passer par une décision gouvernementale d’offrir des formations plus adéquates aux besoins en compétences du secteur privé, ou qui seront sollicitées dans un futur proche dans la perspective de la mise en place d’un programme de transformation industrielle des ressources naturelles locales, lequel serait générateur d’emplois. Plusieurs pays du continent se plaignent de ne recevoir qu’une part minime des recettes d’exploitations tirées des accords miniers passés avec des partenaires étrangers, alors qu’elles savent exactement quoi faire pour remédier à cette situation. Comment comprendre leurs plaintes avec un tel manque de volonté politique ?

Après avoir longtemps négligé le capital humain, notamment, en termes de volume des dépenses d’éducation et d’aide à l’insertion professionnelle, les nations africaines, qui aspirent aujourd’hui à plus d’indépendance, n’ont plus le choix et doivent se donner les moyens d’aller de l’avant, surtout, compte tenu de l’avantage démographique qu’elles possèdent sur les pays des autres continents. Elles n’ont d’ailleurs pas droit à l’erreur car leur échec plongerait l’Afrique toute entière dans une spirale d’instabilités du fait de l’insuffisance des ressources face aux besoins d’une population continentale qui aura fortement augmenté.

Paul Patrick Tédga

MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)

Envie d’accéder aux contenus réservés aux abonnés ?

More
articles

×
×

Panier