TCHAD : Plus de 50 morts (cinquante) lors d’une manifestation contre la prolongation de la transition (Déby va-t-il s’accrocher au pouvoir après ce bain de sang ?)

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Au moins, cinquantaine personnes ont été « tuées par balles », jeudi, 20 octobre, dans les affrontements opposant police et manifestants à N’Djamena. Nous disposons de photos qui sont impubliables. Horribles. Quelle cruauté ! Des milliers de personnes se sont réunies à l’appel de l’opposition contre la prolongation de deux ans de la transition par le pouvoir du président, Mahamat Idriss Déby. Le gouvernement français s’est empressé de faire un communiqué pour dire qu’il n’est ni de près ni de loin, mêlé à ces événements. On rappelle juste que c’est la France qui a placé le jeune général, Mahamat Déby Itno, au pouvoir, au lendemain de l’assassinat de son père sur le front de guerre, en avril 2021, ignorant, royalement, la constitution qui désignait le président de l’Assemblée nationale ou l’un de ses adjoints pour, momentanément, présider le pays, et organiser une élection libre et transparente. Emmanuel Macron s’était même déplacé, personnellement, à Ndjamena, pour participer à son installation comme président de la transition. Au lieu de dire qu’elle n’y est pour rien dans cette tuerie, la France devrait plutôt retirer ce président qu’elle a installé à la tête du pays et laisser la transition se dérouler tranquillement.

« Des violences sont survenues ce (jeudi) matin au Tchad, avec notamment l’utilisation d’armes létales contre les manifestants, ce que la France condamne », a souligné le Quai d’Orsay dans un communiqué, affirmant que Paris ne joue « aucun rôle dans ces événements ».

Des nuages de fumée noire étaient visibles et des tirs de gaz lacrymogène se faisaient régulièrement entendre dans la capitale jeudi matin, tandis que des barricades ont été dressées dans plusieurs quartiers de la ville et que des pneus sont brûlés sur les principaux axes routiers.

Ces affrontements se déroulent après la prolongation pour deux ans de la « transition » qui devait s’achever ce jeudi. Mais, fin septembre, le général, Mahamat Déby Itno a été maintenu à la tête de l’Etat, avec cérise sur le gâteau, la possibilité de se présenter après une nouvelle transition de 24 mois.

Ce maintien, à l’issue d’un Dialogue national inclusif et souverain (DNIS) boycotté par une grande partie de l’opposition, a achevé de braquer les oppositions politiques et armées. Il embarrasse, aussi, la communauté internationale qui avait pourtant adoubé Mahamat Idriss Déby il y a un an et demi. Mais, ici l’embarras ne suffit pas. Après une cinquantaine de morts, la communauté internationale doit tout simplement demander la démission du général, Mahamat Déby Itno. Car il est tout aussi boucher que son défunt père.

Le 20 avril 2021, à l’annonce de la mort du maréchal Déby – tué par des rebelles en se rendant au front – l’armée avait proclamé son fils, Mahamat Idriss Déby, président de la République à la tête d’une junte de 15 généraux, pour une période de transition de 18 mois devant mener à des élections. Cette période finit ce 20 octobre 2022. Si les généraux tchadiens savent ce que veut dire la parole d’honneur d’un officier supérieur, ils doivent simplement quitter le pouvoir.

La manifestation avait été interdite mercredi par les autorités.

Dans le 6e arrondissement, fief de l’opposition où est également situé le domicile du premier ministre, Saleh Kebzabo, les rues sont désertes. Des pneus, des troncs d’arbre, des amas de briques, jonchent les rues. Les établissements scolaires et universitaires sont fermés.

Le siège du parti de Saleh Kebzabo, l’Union nationale pour le développement et le renouveau (UNDR), a été pris pour cible par les manifestants et a été « en partie incendié », a indiqué le vice-président du parti, Célestin Topona.

Ancien ministre du maréchal, Déby Itno, puis opposant à son pouvoir, avant de rallier son fils, Mahamat Idriss Déby, il y a 18 mois, dez zigzags qu’on a du mal à suivre, Kebzabo (qui est néanmoins un modéré) a été nommé à la tête du gouvernement le 12 octobre.

« Ils nous tirent dessus. Ils tuent notre peuple. Les soldats du seul général qui a refusé d’honorer sa parole et aujourd’hui c’est la fin des 18 mois, voilà comment il entend installer la dynastie en tuant le peuple », a déclaré dans un message sur Twitter Succès Masra (notre photo), l’un des principaux opposants du parti, Les Transformateurs, qui avait lancé, mercredi, 19 octobre, un appel à manifester pacifiquement. Une manifestation du reste non autorisée.

En guise de réponse, le fils-Déby a suspendu les partis d’opposition et décrété l’état d’urgence et un couvre-feu général toute la nuit.

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