UNION AFRICAINE : Quand il faut choisir entre légitimer l’AES ou le discrédit

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L’élection de l’ancien ministre djiboutien des Affaires étrangères, Mahmoud Youssouf, à la tête de la Commission de l’Union africaine (UA), mi-février, n’a pas encore adressé les reproches que les Africains font depuis des lustres à la plus grande organisation de leur continent concernant sa gestion des conflits qui menacent de le déstabiliser totalement.

Pour les défenseurs du successeur de Moussa Faki, sa prise de connaissance des dossiers litigieux abandonnés à la hâte par l’ancien leadership de l’UA est toujours en cours. Toutefois, pendant ce temps, les tensions ne s’estompent pas en Afrique, à l’instar du Mali et de l’Algérie, qui candidatent sérieusement pour devenir le nouveau duo de belligérants (sur notre photo, la photo de Mahmoud Youssouf).

Tout a débuté avec l’abattage par l’armée algérienne d’un drone malien sur fond de violation de son espace aérien. Après enquête, la junte de Bamako a contredit Alger arguant que cette destruction résultait d’un acte délibéré. Dans son élan, la capitale malienne a porté plainte au Conseil de sécurité de l’ONU, du jamais vu malgré ses nombreux désaccords avec sa voisine arabe.

Une telle escalade est problématique, d’abord parce que la perte de ce drone militaire évalué à plusieurs dizaines de milliers d’euros a poussé le Mali et l’Algérie à la brèche. Ensuite, car elle entretient l’idée qu’une solution afro-africaine n’est pas possible. C’est cet aspect qui est le plus inquiétant pour l’UA, dont la compétence juridique est remise en doute.

Dans sa configuration élitiste, l’UA a souvent opéré en arrière-plan de ses organes sous-régionaux, laissant la CEDEAO se décrédibiliser en Afrique de l’Ouest. Mais, les limites de ce mode opératoire font qu’aujourd’hui elle se retrouve face à un problème, qu’elle a pourtant vu prendre forme devant ses yeux. Comment ferait-elle maintenant pour se faire entendre à Bamako ?

Qu’une autre solution émanant de la communauté internationale, en plus de celle résultant de l’intervention providentielle du Qatar entre le Rwanda et la RD Congo, soit trouvée pour un problème se déroulant sur son champ d’action serait de mauvaise augure pour sa pertinence. Si pour les Africains, rétablir la paix reste la priorité. Pour l’UA, les préoccupations sont d’ordre existentiel.

La seule alternative restant à l’UA pour ne pas totalement perdre la face dans cette médiation étrangère actuellement à l’œuvre dans ce conflit est d’engager un dialogue direct avec le Mali. Même cela reviendrait en quelque sorte à légitimer l’AES dont il est membre fondateur, elle n’a pas d’autre choix si elle veut être partie prenante sur ce dossier.

Paul-Patrick Tédga

MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)

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