Keir Starmer vient de lancer un assaut contre l’immigration légale en Angleterre. Défait, à la surprise générale, lors des élections locales de la semaine dernière, le premier ministre britannique a réagi en restreignant les conditions d’éligibilité à la citoyenneté dans son pays. Une décision qui risque d’être contre-productive compte tenu des diverses raisons derrière cette contre-performance.
En neuf mois passés au 10 Downing Street, Keir Starmer a fait plus de politique étrangère que de politique intérieure. Si pour certains dossiers, tels que l’abandon du deal de sous-traitance migratoire avec le Rwanda hérité des Conservateurs, il mérite la mention “Bien”, pour d’autres, comme les réparations relatives au Commonwealth et la guerre en Ukraine, il est loin de satisfaire. L’Ukraine étant devenue une obsession pour lui, sans raisons apparentes.
Pendant ce temps, son pays est confronté aux mêmes problèmes majeurs qu’avant son arrivée, notamment, l’immigration illégale, et pour lesquels aucune réponse adéquate n’a encore été trouvée. Selon des chiffres officiels, 10 000 migrants avaient traversé le Canal de la Manche fin avril, soit, 40% de plus que le nombre de l’année dernière à la même période. Un constat bien plus à même d’appeler à une action de l’Etat que celle prise contre les migrants légaux.
Même s’il ne fait pas encore pire que Rishi Sunak sur ce plan, Keir Starmer paraît totalement déconnecté de la réalité lorsqu’il décide de faire de l’immigration légale sa variable d’ajustement après la défaite subie par son parti. En effet, le rallongement de 5 à 10 ans de la période d’attente requise pour demander à être naturalisé et l’interdiction aux entreprises de soins à la personne de recruter à l’étranger ne peuvent que heurter l’économie nationale.

Faire de l’immigration légale son bouc émissaire est un pari risqué pour le premier ministre anglais, surtout, après qu’il ait promis une baisse des flux migratoires dans leur globalité dans un horizon proche. Cette promesse repose sur le contrôle des traversées clandestines, un objectif insaisissable jusqu’à présent. Tout échec profiterait à l’extrême-droite de Nigel Farage, et, dans une moindre mesure, aux Conservateurs pour les prochains rendez-vous électoraux.
Paul-Patrick Tédga
MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)