BENIN : Talon exclut Zinsou de l’élection présidentielle de 2021 (après Ajavon)

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Eu égard à l’évidence de fait du prince qu’est ce procès (qui a rendu inéligible Lionel Zinsou pendant cinq ans, ndlr), je m’étais exprimé le 20 juillet 2019 dans un bref qu’on peut lire à la fin de ce texte ; le terme inéligibilité – pétard mouillé dans le marigot de vanités des crocodiles infatués – m’a fait pouffe ; je me demande même si ces alligators ont quelques mérites. Zinsou est mis hors course de la présidentielle de 2021, après Sébastien Ajavon, sorti troisième à l’élection présidentielle de 2016. Conséquence : Talon veut s’octroyer un deuxième mandat en 2021 sans adversaires de taille.

Né en 1954, Lionel Zinsou aura 70 ans en 2020 ; qu’on lise ou relise la constitution de la République du Dahomey devenu République du Bénin, on verra que la condamnation à 5 ans d’inéligibilité souligne sans vergogne l’ostracisme d’un candidat potentiel gênant – s’il n’avait pas d’autres chats à fouetter- qui ferait mordre la poussière à celui en qui un précon officieux semble voir le Rédempteur, malgré la recrudescence des corruptions, du chômage, l’exil des valeurs sûres, etc.

Ce qui se passe au Bénin depuis l’élection du candidat, Patrice Talon, à la tête de mon pays natal ne m’a pas fait rouvrir Le Prince ni Discours sur la première décade de Tite-Live, mais, relire le prologue de L’Initié : Machiavel prévenait qu’un prince qui « transgresse et enfreint  » la constitution de son « Etat en est chassé par la force extraordinaire et excessive »;

« le Prince qui a plus peur de son peuple que des étrangers doit bâtir des forteresses ; mais celui qui craint plus les étrangers que ses sujets ne s’en doit point soucier »;

 » la meilleure citadelle qui soit, c’est de n’être point haï du peuple : car encore que tu tiennes les forts, quand le peuple te porte haine, ils ne te sauveront pas, à raison qu’après que les sujets ont pris les armes, ils n’auront jamais faute d’étrangers à venir à leur aide ».

Il y a exactement 40 ans que ces citations figurent dans ce roman publié en 1979, piétiné au Bénin, longuement analysé en Italie dans une communication appréciée par le très regretté cardinal, Bernardin Gantin, enfin, dans le corpus d’un doctorat à Tel Aviv !

Que constate-t-on au Bénin en 2019 ? La constitution bafouée, le pays doit marcher en ordre conformément au diktat du chef de l’Etat autocrate ; un arrêt récent du ministre de la Justice -un Quénum, hélas !- fait des Béninois de la diaspora des allogènes, sauf, bien sûr, les marsouins que prébende le pouvoir répressif ; ces renégats me font penser aux condottieri dans Le Prince :  » Hiéron de Syracuse[…]mis par les Syracusains à la tête de leur armée, reconnut bientôt l’inutilité des troupes mercenaires qu’ils soldaient, et dont les chefs ressemblaient en tout aux condottieri que nous avons eus en Italie ».

Mutatis mutandis, en remplaçant Hiéron de Syracuse par Patrice Talon et les Syracusains par certains membres de son gouvernement et par des précons officieux qui le considèrent comme le rédempteur, on aura le portrait craché du Bénin, ex-quartier latin de l’ex-AOF actuellement internationalement décrié. Je ne souhaite pas aux condottieri du Bénin le sort de leurs lointains homologues car, Machiavel écrit magnifiquement : « Convaincu d’ailleurs que le Prince ne pouvait sûrement ni conserver ces chefs, ni les licencier, il prit le parti de les faire tailler en pièces ».

Je ne souhaite pas qu’on en arrive là pour ceux qui contribuent à la ruine du pays mais je compte sur la force du peuple unanime c’est-à-dire ce que Machiavel nomme « l’ordre tiers », capable de s’opposer au régime en cours.

Indignation ! C’est à faire vomir du sang ! Après le racisme consistant à traiter Lionel Zinsou de Blanc, c’est la haine atavique qui fait dégainer en montrant les crocs et en bavant. Je ne dois pas un F CFA à qui que ce soit au monde ; Lionel Zinsou était ma préférence pour l’élection présidentielle au Bénin ; je ne l’avais jamais vu de près avant la réunion très populaire de la Mutualité (à Paris). Mon soutien me vaudra des appels téléphoniques, voire, des lettres ; on m’avait écrit, lourdement, sollicité pour un autre candidat, en déclarant même : « …vous y gagnerez beaucoup… » Gagner quoi ? Je ne suis pas un homme qu’on achète.

Dépassement ? Quel en est le montant comparativement à d’éventuels autres, en l’occurrence, soyons sans ambages : celui du candidat Patrice Talon même s’il est milliardaire ?

Je le dis encore sans ambages : si Lionel Zinsou était une crapule, il se serait adressé, par exemple, à la banque Edmond de Rothschild afin d’obtenir un emprunt largement substantiel pour en asperger la clientèle de la politique du ventre ; il aurait été démocratiquement élu, mais, la coterie des haineux qui ont la haine chevillée au corps et ancrée dans la cervelle aurait encore dégainé aujourd’hui en l’accusant d’avoir livré le Bénin à un Juif, bien que de jeunes Béninois boursiers d’Israël y soient en formation en agronomie ou dans d’autres secteurs pour le développement de notre pays. Seigneur ! Jusqu’à quand dureront les agissements et les préjudices qui handicapent ma terre natale maintenant chargé de licous et de chaînes comme au temps de l’esclavagisme ?

Olympe BHÊLY-QUENUM

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