CENTRAFRIQUE : Les pygmées, ces laissés pour compte de l’Etat et des pouvoirs publics

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La Centrafrique compte quelques 15.000 pygmées vivant en communautés semi-nomades en forêt ou sédentarisés hors de leur habitat traditionnel, en lisière de forêt (sur notre photo qui montre leur bonheur de vivre dans leur environnement sans agression extérieure). Sa constitution est censée, depuis 2016, les protéger au titre des  » populations autochtones ».

Par ailleurs, la Centrafrique est fière de son slogan :  » Zo kwe zo « qui en sangho, signifie « Tous les hommes sont égaux ». 

Dans les faits, les différents gouvernements qui se sont succédé depuis l’indépendance, ont peu agi pour améliorer leur condition.

Le droit de vote ne leur a été reconnu qu’en 2006. 

Ils sont, dans leur vie quotidienne, en butte à la discrimination, à l’exploitation et à la violence (viols, exactions, châtiments corporels, travail forcé …) de la part de leurs concitoyens. 

Les pygmées sont, encore, trop souvent, l’objet des pires moqueries et contraints d’exécuter les corvées les plus rebutantes. 

La vraie vie de ce peuple de chasseurs-cueilleurs est dans la forêt, mais, la forêt ne leur appartient plus car elle recule du fait d’une déforestation menée « tambour battant par des entreprises forestières et des agriculteurs peu scrupuleux, soucieux d’étendre leurs exploitations. 

Les agriculteurs qui emploient les pygmées, les maintiennent attachés dans un état proche du servage,  de l’esclavage. Les militaires et les milices, même si les pygmées tentent de leur échapper en se réfugiant en forêt, les rançonnent. Les religieux, pasteurs ou imams, tout en leur apportant une aide, les incitent à renoncer à leurs traditions et à leurs croyances.

Ce sont autant d’atteintes aux droits humains les plus élémentaires et à leur identité.

La disparition de la culture pygmée serait une perte pour la Centrafrique, pour l’humanité. 

On a beaucoup à apprendre de leurs chants, de leurs contes, de leur cosmogonie, de leur connaissance de la forêt. 

Dans le contexte actuel de violences, d’occupation d’une grande partie du territoire par les milices et de risques de pandémie, l’amélioration de la protection des pygmées en Centrafrique n’est pas une priorité du gouvernement centrafricain. 

Un certain nombre de chercheurs médecins ou ethnologues, d’associations, d’ONG, de médias se battent pour défendre les droits des pygmées, sans se faire beaucoup d’illusions.

 Il y a un fait nouveau : le coronavirus qui fait courir un risque supplémentaire aux populations pygmées souvent isolées, éloignées des points d’eau, des centres de santé. 

La condition des pygmées de Centrafrique est plus que jamais d’actualité, tout comme au Congo, au Cameroun, au Gabon, au Rwanda ou en Ouganda.

Patrick David 
est docteur en droit
Fontenay-aux-roses (France)

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