CENTRAFRIQUE : Pourquoi l’Accord de Khartoum a déjà du plomb dans l’aile

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L’Accord de Khartoum, le 8e du genre, signé entre le pouvoir centrafricain et les rebelles vient d’être violé, au lendemain du séjour d’un représentant de l’Union africaine (UA), à Bangui, venu le conforter après la perte du pouvoir d’un de ses principaux parrains, le président soudanais, Omar el-Béchir. En effet, des éléments du groupe armé, Front démocratique du peuple centrafricain (FDPC), ont attaqué, lundi, 22 avril, le village de Lokoti, dans l’Ouest du pays, où ils ont incendié des véhicules et pris en otage onze personnes, selon des informations recueillies auprès de la gendarmerie locale. L’Accord de Khartoum a, donc, du plomb dans l’aile. Sa signature en fanfare, à Bangui, en présence du président de la République centrafricaine, Faustin-Archange Touadéra, et des représentants de l’Union africaine, de la Russie, de la France et des Etats-Unis, n’était qu’un coup d’épée dans l’eau ? La question se pose de savoir s’il y aura la nécessité de signer un 9e accord, celui-ci étant, déjà, violé et bientôt mort ?

« Ils sont entrés dans le village, ont incendié deux camions ainsi qu’une moto », a indiqué une source à la gendarmerie de Bouar, ville située à environ 70 km de Lokoti.

Onze personnes ont été prises en otage par les éléments du FDPC, les autres villageois ont réussi à prendre la fuite, a précisé cette source.

« Les casques bleus sont dans une phase d’action et de recherche dans la zone », a indiqué, mercredi, 24 avril, à la presse, le porte-parole de la MINUSCA (Mission des Nations-Unies pour la stabilisation du Centrafrique), Vladimir Monteiro.

Début avril, une opération militaire avait été lancée par la MINUSCA dans la zone contre ce groupe implanté localement, mais, sans influence nationale.

L’ONU reprochait au groupe armé d’avoir érigé des barricades sur la route nationale 1, la seule permettant d’approvisionner Bangui depuis le Cameroun, et volé une dizaine de pick-up.

Le premier ministre centrafricain, Firmin Ngrebada, avait alors « appelé à la raison » le FPDC.  » (Nous) n’avons pas signé un accord de paix pour revenir à la guerre », avait-il déclaré.

Après la signature d’un accord de paix début février entre Bangui et 14 groupes armés, dont le FDPC, ce dernier avait érigé des barricades en signe de mécontentement vis-à-vis des autorités qui, selon lui, n’avaient « pas respecté » l’accord dans la formation du gouvernement.

Un nouveau round de négociations avait eu lieu, mi-mars, en Ethiopie, et un nouveau gouvernement avait été nommé le 22 mars.

Si le leader du groupe, le général, Abdoulaye Miskine, avait décliné le poste ministériel qui lui était destiné, l’un de ses proches avait été nommé « conseiller spécial » à la primature, et l’autre, préfet de la Nana-Mambéré, région de l’Ouest. Le général pense que ces nominations à minima sont la preuve que le pouvoir de Bangui se moque, éperdument, de lui. Et que la meilleure façon de se faire respecter, c’est de le montrer sur le terrain, en y installant terreur et peur au niveau des populations. L’absence de l’Etat et de l’armée centrafricaine dans cette zone de non-droit l’y aide beaucoup. Autrement dit, c’est au pouvoir d’apporter des solutions à ce problème qui est récurrent (sur notre photo le général Abdoulaye Miskine intègre le processus de paix et de réconciliation en signant le document à cet effet avec le ministre et ancien candidat à la présidentielle Jean Wilybiro Sako, le 1er juin 2017, à Brazzaville, sous la supervision du ministre congolais de l’Intérieur, Raymond Zéphyrin Mboulou).

L’accord de Khartoum, soutenu par tous les partenaires de Bangui et préparé depuis 2017 par l’UA, est le huitième signé depuis le début de la crise marquée par le renversement en mars 2013 du président, François Bozizé.

L’élection présidentielle aura lieu en fin d’année prochaine. A moins d’être un IBK (Ibrahim Boubacar Keïta) de l’Oubangui-Chari, on voit mal comment Faustin-Archange Touadéra pourra tenir un langage convainquant devant une population qui aura tout subi pendant son quinquennat. Cela fait bientôt 4 ans que les Centrafricains ne sentent pas dans leur vie quotidienne qu’ils ont élu un président de la République début 2016. Une situation qui permet, naturellement, à l’opposition de se frotter les main en silence.

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