COTE D’IVOIRE : La politique d’ivoirité de Bédié doit être soutenue et encouragée à aller plus loin

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Devant une délégation du PDCI (Parti démocratique de Côte d’Ivoire), qu’il recevait chez lui à Daoukro, le 5 juin 2019, Henri Konan Bédié aurait déclaré ceci : “Nous avons fait venir des étrangers dans nos plantations de café et de cacao et ensuite ces gens se sont installés à leur propre compte et aujourd’hui ils agressent les planteurs ivoiriens et se disputent même la propriété des terres… Il faut simplement que nous soyons conscients car, le moment venu, nous agirons, pour empêcher ce hold-up sur la Côte d’Ivoire, sous le couvert de l’orpaillage… Nous dénoncerons aussi d’autres qu’on fait venir clandestinement, surtout, dans la commune d’Abobo ; les gens rentrent, on leur fait faire des papiers… Il faut que nous réagissions pour que les Ivoiriens ne soient pas étrangers chez eux, car actuellement, on fait en sorte que l’Ivoirien soit étranger chez lui…”.

La déclaration de Bédié soulève plusieurs questions. Je me limiterai à en examiner cinq et m’efforcerai d’y répondre :

1) Ce qu’a dit Bédié est-il vrai ? Oui. Autrement dit, Bédié ne délire pas, ni n’affabule. Il ne fait qu’énoncer des faits constatables et vérifiables par quiconque est objectif et honnête.

2) A-t-il été excessif ? A-t-il tenu des propos graves ? Non. Le seul individu qui ait prononcé des paroles “de nature à mettre en péril la paix, la cohésion sociale, l’unité nationale et la stabilité du pays”et qui méritait, pour cela, d’être immédiatement arrêté et jeté en prison, c’est Dramane Ouattara parce qu’il avait dit : “Je rendrai ce pays ingouvernable ; je n’attendrai pas 5 ans pour prendre le pouvoir.” Malheureusement, à cette époque-là, nous étions gouvernés par des gens qui ne prenaient rien au sérieux et qui se contentaient de dire qu’ils voyaient le dos du nageur.

3) Devait-il appeler ses compatriotes au sursaut national, à la vigilance et à l’action contre ceux qui veulent déposséder les Ivoiriens de leurs terres et faire d’eux des étrangers dans leur propre pays ? Oui. A mon avis, il aurait dû lancer cet appel plus tôt. Malheureusement, et c’est un des reproches qu’on peut lui faire, ce qui comptait pour lui, à ce moment-là, ce n’était ni le sort des Ivoiriens, ni le bien de la Côte d’Ivoire, mais, les avantages et privilèeges que Ouattara lui accordait.

4) Bédié visait-il tous les étrangers ? Non car les Tchadiens, Mauritaniens, Camerounais, Gabonais, ne se mêlent pas de la politique ivoirienne et ne s’immiscent pas dans nos affaires. Il doit, certainement, avoir en tête certains Maliens, Guinéens et Burkinabè qui croient à tort que la Côte d’Ivoire est un no man’s land et militent ouvertement et bruyamment au RDR (Rassemblement des Républicains). Quand on voit le rôle négatif joué, hier, par le Béninois, Albert Tévoedjrè, contre notre pays et les positions qu’occupent certains de ses compatriotes dans notre pays au détriment des Ivoiriens, on ne peut pas considérer que ces Maliens, Guinéens et Burkinabè, soient les seuls ressortissants de la CEDEAO à adhérer à la fausse théorie selon laquelle, la Côte d’Ivoire ayant été construite en partie par eux, elle leur appartient aussi.

5) Faut-il croire Bédié quand il affirme que les Ivoiriens doivent être “conscients pour empêcher ce hold-up sur la Côte d’Ivoire” ? A-t-il vraiment pris conscience de la gravité de la situation et sera-t-il en mesure, le moment venu, de joindre l’acte à la parole ? Bref, sera-t-il suffisamment courageux pour aller jusqu’au bout ? Pour moi, aller jusqu’au bout signifie demander le départ des troupes françaises et la fermeture du 43e BIMA, rapatrier l’immense fortune qu’il a gardée en France, commencer à créer des entreprises et usines avec les milliards sur lesquels lui et ses proches sont assis : batailler avec tout le FPI pour un soulèvement populaire et une transition qui organiserait des élections justes et transparentes ( sur notre photo Henri Konan Bédié avec Laurent Gbagbo ). Si le président du PDCI fait cela, alors, on pourra dire qu’il a changé de comportement, qu’il place, désormais, les intérêts du pays au-dessus de tout, qu’il est avec nous et qu’il n’a pas dit ce qu’il a dit le 5 juin parce que Dramane Ouattara, dont il vantait les mérites et chantait les louanges il n’y a pas longtemps, a refusé de lui faire la passe en 2020.

Pour terminer, je suis favorable à ce que Bédié soit soutenu et encouragé à ne pas s’arrêter en si bon chemin. Ce combat, nous devons l’aider à le gagner afin qu’il puisse sortir par la grande porte, mais aussi, et surtout, pour que la Côte d’Ivoire revienne aux Ivoiriens. Si le nationalisme a commencé à se manifester dans les Etats-Unis de Donald Trump, s’il s’affirme, deplus en plus, en Europe, ce n’est pas nous, Ivoiriens, qui devrions rougir d’aimer et de défendre la terre de nos ancêtres. Nous ne devrions accepter que X ou Y nous donne des leçons sur cette question. Nous devons être fiers du slogan “Ivoiriens, d’abord!” et le manifester dans nos actes de tous les jours.

Jean-Claude DJEREKE
est professeur de littérature à l’Université de Temple (Etats-Unis).

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