CPI : VERS LA LIVRAISON D’OMAR EL-BÉCHIR (UNE LÂCHETÉ SUPRÊME DES AUTORITÉS SOUDANAISES)

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L’ancien dirigeant soudanais, Omar el-Béchir, va être remis à la Cour pénale internationale (CPI), a indiqué, mercredi, 11 août, la ministre soudanaise des Affaires étrangères. Un ex-gouverneur et un ancien ministre de la Défense seront, eux aussi, remis au tribunal international. Tous sont soupçonnés de « génocide » et de « crimes contre l’humanité » au Darfour. Le Soudan prend une telle décision à cause de la pression des pays occidentaux dont les Etats-Unis alors qu’aucun de leur ressortissant ne peut être jugé par cette juridiction. Pourquoi ce qui n’est pas bon pour les Etats-Unis et les autres pays occidentaux comme la Grande-Bretagne et la France, est bon pour le Soudan ? Pourquoi les autorités soudanaises n’ont pas opté pour le jugement des forfaits de l’ancien président, Omar el-Béchir, au Soudan même (comme le font les autres pays occidentaux) ? La CPI est-elle, au final, une juridiction africaine qui ne dit pas son nom ?

« Le Conseil des ministres a décidé de remettre les personnes recherchées à la Cour pénale internationale », a déclaré la ministre, Mariam al-Mahdi, selon l’agence officielle, Suna, lors d’une rencontre avec le nouveau procureur général du tribunal basé à La Haye, Karim Khan, en visite à Khartoum pour une semaine (sur notre photo, Omar el-Béchir actuellement en prison, à Khartoum, reçoit un de ses avocats).

Le conflit au Darfour, région de l’Ouest du pays, a opposé à partir de 2003, le régime à majorité arabe de Omar el-Béchir et des rebelles issus de minorités ethniques s’estimant marginalisées. Il a fait environ 300 000 morts et près de 2,5 millions de déplacés, en majorité, durant les premières années de violences, d’après les Nations-Unies. Omar el-Béchir a été renversé en avril 2019, après des mois d’un mouvement populaire inédit.

En février 2020, le pouvoir de transition mis en place après sa chute avait pris l’engagement verbal de favoriser la comparution d’Omar el-Béchir devant la CPI, qui a émis il y a plus de dix ans des mandats d’arrêt contre lui et d’autres figures de l’ancien régime, pour « crimes contre l’humanité » et « génocide » au Darfour. Mais, le nouveau régime au pouvoir n’était pas obligé de respecter un tel engagement qui bafoue, littéralement, la souveraineté du Soudan. La CPI va-t-elle devoir son fonctionnement par la seule comparution des prévenus africains ? Ce n’est pas juste dans un monde où des délinquants pouvant y être jugés se comptent par dizaines sinon plus de par le monde.

Les deux autres pontes du régime qui seront remis à la CPI sont l’ex-gouverneur de l’Etat du Kordofan-Sud, Ahmed Haroun, et l’ancien ministre de la Défense, Abdel Rahim Mohamed Hussein, recherchés pour les mêmes motifs. Arrêtés après la chute d’Omar el-Béchir, ils sont actuellement détenus au Soudan.

Un accord de paix historique signé en octobre 2020 entre le gouvernement de transition et plusieurs groupes rebelles insistait sur la nécessité d’une « coopération complète et illimitée » avec la CPI.

Le cabinet ministériel soudanais a voté en faveur de la ratification du Statut de Rome de la CPI. La ministre soudanaise a souligné, mercredi, 11 août, « l’importance » de la coopération de son pays avec la CPI « pour obtenir justice pour les victimes de la guerre du Darfour ».

Déjà reconnu coupable de corruption en décembre 2019, l’ex-président est actuellement détenu à la prison de Kober, à Khartoum. Il est, aussi, jugé par la justice soudanaise pour son rôle dans le coup d’état, qui l’a porté au pouvoir en 1989. Mais, son procès a été à plusieurs reprises reporté depuis juillet 2020, les avocats de l’accusé avançant des arguments procéduraux.

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