Cité internationale de la langue française ou Cité de la Francophonie ? La question n’est pas encore tranchée. Car s’il s’agissait de la Cité de la Francophonie, les ambassadeurs des pays francophones auraient été conviés à la cérémonie. Pourtant, les chaînes de télévision (d’Etat), à savoir, France 2 et Franceinfo, mettant, tantôt « Cité internationale de la langue française), tantôt « Cité de la Francophonie », montraient leur embarras. D’autre part, dans le discours prononcé par le chef de l’Etat, la première personne à être citée était « Madame la Secrétaire Générale de l’Organisation internationale de la Francophonie), présente, après avoir assisté, à Brazzaville, le 28 octobre, à l’ouverture du Sommet des trois Bassins forestiers. Elle a pris l’avion le même soir pour être à Paris, le 29 matin et assister, le lendemain, aux côtés du président français à cette cérémonie. A-t-elle fait ce périple au nom de la Francophonie ou pour la beauté de la langue française ? Ca questionne d’autant plus que le 1er novembre, elle devrait, à nouveau, être dans l’avion pour se rendre, cette fois, à Yaoundé où elle co-dirigera la Conférence ministérielle de la Francophonie (88 ministres des Affaires étrangères et de la Francophonie attendus) avec le chef de la diplomatie camerounaise, hôte de la Conférence, Lejeune Mbella Mbella. Le président français a fait un très beau discours qui fait oublier, pour le moment, cette question non tranchée mais qui ne tardera pas à faire surface.

La cité en question est domiciliée à Villers-Cotterêts, dans les Hauts-de-France, à 80 km de Paris, 45 minutes par train, une ville de 10.000 personnes, frappée par le chômage et la désindustrialisation. Emmanuel Macron y pense depuis mars 2017, pendant sa campagne, alors qu’il ne savait pas qu’il serait élu. C’est une ville tenue par l’extrême-droite, depuis 2014, mais, choisie comme bastion de reconquête pour le camp macroniste. Macron aime les défis comme s’il voulait toujours repousser ses capacités.

Un monument pour faire rayonner la francophonie, a-t-on cru entendre, la langue française faisant partie intégrante de la francophonie. Même si l’extrême-droite, traditionnellement, n’aime pas ce qui rime avec étrangers. Or, la francophonie, c’est étranger par excellence. Les francophones ne seront-ils pas les bienvenus à Villers-Cotterêts ? Le maire RN, Franck Briffaut, voit, cependant, le projet, et ses 200 000 visiteurs espérés par an, comme « une formidable chance » pour sa ville. C’est déjà ça. Et Emmanuel Macron, en choisissant ce lieu, veut « montrer que le redressement du territoire ne passe pas par le repli sur soi, mais bien davantage et avec beaucoup plus de chances de succès, par l’ouverture », souligne son entourage. Par ce temps de débat sur la énième loi sur l’immigration, où la position gouvernementale défendue par le ministre de l’Intérieur, Gérard Darmanin et ses collègues, est aux antipodes de celle des camarades de Marine Le Pen, il faudra soutenir le gouvernement quitte à ce qu’il passe par le 49.3 pour faire passer sa vision.

La Cité a été installée dans le château de Villers-Cotterêts, joyau Renaissance où François Ier avait signé, en 1539, l’ordonnance imposant le français dans les textes juridiques, prémices de son usage comme langue officielle. Cela nous ramène très loin. Les Français eux-mêmes, pour leur majorité, n’y connaissent pas grand-chose.

« Premier projet dédié à la langue française au monde », le lieu « sera le cœur battant de la francophonie », assure la ministre de la Culture, Rima Abdul-Malak, présente aux côtés du président. « Ce projet réunit la force de la langue française et la reconnaissance de sa diversité », ajoute la ministre.

« Bibliothèque magique » cubique contenant des milliers d’ouvrages, où une intelligence artificielle délivre au visiteur un conseil de lecture personnalisé, dictée interactive, spectacles et résidences d’artistes : la Cité « n’est pas un musée », souligne son directeur Paul Rondin.

« On n’est pas ici pour conserver la langue française mais pour la faire vivre, révéler sa diversité extraordinaire », s’enthousiasme-t-il.

Dans son discours, le président, Emmanuel Macron, a tenu à préciser que la plus grande capitale du monde où on parle le français n’est nullement Paris. « C’est Kinshasa » dont le pays abrite aussi le plus grand nombre de locuteurs en français. Pendant que la natalité ne fait que décroître en Europe francophone (France, Suisse, Belgique, etc.), elle décuple en Afrique où la moitié des 54 Etats pratiquent le français. Question : L’avenir de la langue est alors où ? En Afrique bien sûr !

A quatre ans de la fin de son deuxième et dernier mandat, il est souhaitable qu’Emmanuel Macron mette en pratique sa vision d’ouverture vers le monde. Il a fustigé le repli sur soi des extrémistes de droite. A lui de ne pas avoir peur de les affronter pour faire ce que lui indiquent son cœur et sa conscience.

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