GUINEE : Alpha Condé réinstalle la monogamie au grand mécontentement des chefs religieux et traditionnels

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Le président, Alpha Condé, est un chef d’Etat moderne et entend le rester. Il n’est pas un Jacob Zuma qui s’assume dans une polygamie sans complexe que les Sud-Africains respectent, même s’ils ne sont pas très d’accord avec lui. Zuma compte 5 épouses et trois maîtresses officielles. Au moins. En tant que chef de l’Etat, Alpha Condé, lui, montre l’exemple à suivre avec une seule et unique épouse, Djéné Kaba Condé, qui est la première dame de Guinée (notre photo). Le président guinéen ne passera plus le temps à expliquer pourquoi un homme de son profil, dans notre monde d’aujourd’hui, a cautionné le vote d’une loi sur la polygamie en Guinée.

Le Parlement de Guinée a, donc, modifié le code civil pour faire de la monogamie le régime général du mariage, sauf en cas « d’accord explicite » de la première épouse. Cette modification prend le contre-pied d’un texte voté fin 2018, qui légalisait la polygamie. Ayant provoqué un tollé grave dans le pays, ce texte avait été rejeté par le président Alpha Condé. Mais, c’était trop tard. Car il était considéré comme celui qui l’avait laissé passer. Il a, donc, fallu faire marche-arrière. Malgré le courroux des chefs religieux et traditionnels qui tiennent à conserver les valeurs ancestrales. Cela dit, le président n’a pas reculé. Il a tenu bon, faisant, certainement, quelques mécontents (irréductibles).

Voté, jeudi, 9 mai, en séance plénière, le nouveau texte faisait, depuis quelques jours, l’objet de critiques dans les médias guinéens, tant la polygamie fait partie des pratiques courantes, y compris au sein de la classe dirigeante. La Guinée est un pays musulman par excellence. Et la religion musulmane permet à un homme (capable) d’avoir quatre épouses, voire, plus.

De très nombreux hommes y ont plusieurs femmes, mais, les deuxièmes, troisièmes ou quatrièmes épouses, avec qui ils s’unissent lors de mariages religieux ou traditionnels, ne jouissent pas des mêmes droits que les femmes épousées en premier lors de mariages civils, notamment, en matière d’autorité parentale ou de succession.

En décembre, les députés avaient, largement, adopté un nouvel code civil dont l’article 281 affirmait que « le mariage peut être conclu soit sous le régime de la monogamie, soit, sous le régime de la polygamie limitée à quatre femmes ».

Le texte disait, aussi, que « faute pour l’homme de souscrire à l’une des options », « le mariage est présumé être placé sous le régime de la polygamie », laissant donc le dernier mot à l’époux.

Mais, le président, Alpha Condé, n’avait « pas apprécié » le vote de cette loi, selon ses services, et renvoyé le texte au parlement.

En seconde lecture, 71 des 73 députés présents ont voté en faveur d’une nouvelle version de l’article 281, qui affirme à présent que « le mariage est soumis au régime de la monogamie pour tous les citoyens guinéens ».

Toutefois, « le futur mari peut, au moment de la célébration du mariage, en présence de sa future épouse et avec l’accord explicite de celle-ci, déclarer qu’il opte pour la polygamie limitée à deux, trois ou quatre femmes au maximum », selon un texte qui fait écho à la situation au Sénégal voisin. A défaut, « le mariage est placé de manière irrévocable sous le régime de la monogamie ».

« Les discriminations au détriment des femmes ont été corrigées. Le principe de la monogamie est consacré comme par le passé et la polygamie est devenue une exception », a déclaré la députée, Traoré Zalikatou Diallo, se disant « vraiment émue ».

« Les lois qui sont prises aujourd’hui, c’est pour faire plaisir aux Occidentaux sans tenir compte de nos coutumes et de nos meurs », a, au contraire, fustigé Aboubacar Soumah, l’un des deux députés à avoir voté contre.

Un ancien ministre de la Communication, Alhoussein Makanéra Kaké, arguant qu' »il y a plus de femmes que d’hommes », a assuré « préférer » voir sa fille « deuxième ou troisième épouse que de la voir vieillir sans homme ».

« Si par la grâce de Dieu, un homme décide d’épouser une fille et que quelqu’un vient lui dire qu’il ne peut pas parce qu’il est marié à une autre, vous voyez ce que ça fait », a commenté le grand imam de la mosquée de Kipé, un quartier de Conakry, en expliquant que le coran autorise jusqu’à quatre épouses « à conditions d’être justes avec elles ».

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