SENEGAL : Compte à rebours de Macky Sall (2e et dernier mandat Inch’Allah !)

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Le camp présidentiel a perdu la majorité absolue à l’Assemblée nationale mais reste en tête d’une très courte avance à l’issue des élections législatives au Sénégal du 31 juillet, selon les résultats officiels provisoires de la Commission nationale de recensement des votes (CNRV).

Pour la première fois depuis l’indépendance en 1960, la formation au pouvoir perd la majorité absolue et devra s’appuyer sur d’autres forces au parlement pour faire passer ses lois. C’est une situation inédite, qui hypothèque de fait, la rumeur qu’on prêtait au président, Macky Sall, de vouloir procéder à la modification de la constitution pour obtenir un troisième mandat. Ceci bien que le Sénégal ne soit pas la Côte d’Ivoire ni la Guinée où les présidents des deux pays concernés avaient bravé leur opposition pour briguer un troisième mandat. Depuis, l’armée a réglé son compte au président guinéen en chassant Alpha Conté du pouvoir. Au Sénégal où ce projet ne passe pas au niveau de l’opinion, Macky Sall devra tout simplement terminer son mandat et s’en aller comme son prédécesseur, Abdoulaye Wade. Car avec cette majorité relative à l’Assemblée nationale, il ne devra prendre aucun risque. Ce serait de la pure provocation.

La coalition du président Benno Bok Yakaar passe de 125 députés en 2017 à, seulement, 82, sur les 165 que compte l’Assemblée, selon les résultats officiels provisoires. C’est dire que Macky Sall a perdu un tiers de sa crédibilité au sein de l’opinion. Mais malgré cette situation, au lieu de jeter l’éponge, il nourrissait les velléités d’un troisième mandat comme s’il restait populaire dans le pays. L’opposition évite donc l’érection d’une dictature au Sénégal, ce qui est une bonne chose.

L’opposition confirme sa dynamique initiée lors des élections locales de janvier, notamment, dans certaines grandes villes, et gagne 80 sièges de députés au total : 56 pour la Coalition Yewwi Askan Wi et 24 pour celle de Wallu Sénégal – les deux ayant formé une alliance pour les législatives.

Trois autres députés sont issus des rangs de trois autres petites coalitions de partis.

Les chiffres définitifs doivent être publiés par le Conseil constitutionnel en début de semaine s’il n’y a pas de recours.

Macky Sall, désavoué par les urnes, doit, absolument, commencer à chercher un point de chute après le palais présidentiel. Elu en 2012 pour sept ans et réélu en 2019 pour cinq ans, il maintenait le flou sur ses intentions. Les électeurs ont décidé à sa place. Honte à lui !

Macky Sall a promis qu’il nommerait un premier ministre – poste qu’il avait supprimé en 2019 puis rétabli en décembre 2021 – au sein de la formation victorieuse des élections.

Après le vote, les chiffres remontant des commissions départementales de recensement des votes ont fait état d’un scrutin très serré et les deux camps ont revendiqué la victoire.

Yewwi Askan Wi (Libérer le Peuple, en wolof), la principale coalition de l’opposition, formée autour d’Ousmane Sonko – arrivé troisième de la présidentielle de 2019 – s’est alliée pour les élections à la coalition Wallu Sénégal (Sauver le Sénégal, en wolof), dirigée par l’ex-président Abdoulaye Wade, élu député jeudi à l’âge de 96 ans.

Un responsable de cette alliance a saisi la Commission électorale pour lui demander « le droit de vérifier les procès-verbaux (de bureaux de vote) en vue de faire ses observations et réclamations éventuelles dans les délais légaux ». Aïda Mbodj, autre leader de l’opposition, a parlé mercredi soir lors d’une conférence de presse de « bourrage d’urnes » et de « procès-verbaux préfabriqués et sans signature qu’ils (le pouvoir) ont créés eux-mêmes » dans des localités du Nord du Sénégal dont Matam, Podor, Ranérou et Kanel, des fiefs du président, Macky Sall.

« Nous n’allons pas accepter une confiscation de la victoire. C’est une entreprise de fraudes massives orchestrées par des hommes politiques avec certainement la complicité de l’administration » territoriale, a renchéri Ousmane Sonko.

Le président,Macky Sall, affaibli par ce score, s’est, pour sa part, félicité du bon déroulement des élections « dans le calme, la sérénité et la transparence, sur l’étendue du territoire national », mercredi à l’issue du Conseil des ministres. « Je salue le peuple sénégalais, suite à la proclamation provisoire des résultats des élections législatives, pour l’exemplarité de notre démocratie, la crédibilité de notre système électoral », a souligné Macky Sall sur Twitter (sur notre photo Macky Sall qui est prié par les électeurs sénégalais de respecter le principe de deux mandats qu’il voulait bafouer).

La coalition présidentielle assure aux Sénégalais « la poursuite de réformes indispensables à la construction d’un Sénégal solidaire, prospère, dans un état de droit » et appelle « à la consolidation de (notre) démocratie et de (notre) République », a déclaré après les résultats Aminata Touré, sa tête de liste.

Le vote s’est déroulé dimanche, 31 juillet, sans incident majeur, avec un taux de participation de 46,64 %, selon la CNRV.

Les observateurs internationaux de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et le Collectif d’organisations de la société civile pour les élections (COSCE) ont noté le caractère paisible et transparent du scrutin. 

La pré-campagne, elle, avait été émaillée d’incidents, en raison de l’invalidation par le Conseil constitutionnel des titulaires de la liste nationale de la coalition dirigée par Ousmane Sonko, contraints de renoncer à participer aux élections. Ces manifestations avaient fait au moins trois morts.

« La coalition au pouvoir est à bout de souffle. La cherté des denrées, le renchérissement du prix de l’eau, les pratiques autoritaires autour des manifestations suivies de morts expliquent ce vote-sanction contre le président », soulignent, en gros, les analystes politiques nationaux.

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