Malgré son emprisonnement pour détournement de fonds publics, depuis mars 2017, le maire de Dakar, Khalifa Sall, continuait de jouir de ses prérogatives de maire, même étant en prison. Il signait des actes, procédait à des nominations et exerçait toutes ses fonctions de maire à la seule différence qu’il le faisait derrière les barreaux. Depuis, vendredi, 31 août, il ne pourra plus le faire.
Le président sénégalais, Macky Sall, a révoqué de ses fonctions le maire de Dakar, Khalifa Sall, au lendemain de sa condamnation en appel à cinq ans de prison pour escroquerie sur les deniers publics, selon un décret publié vendredi, 31 août : « Monsieur Khalifa Ababacar Sall est révoqué de ses fonctions de maire de la Ville de Dakar », d’après le texte de ce décret signé par Macky Sall et par le premier ministre, Mahammed Boune Abdallah Dionne.
La Cour d’appel de Dakar a confirmé, jeudi, 30 août, la peine de cinq ans décidée en première instance à l’encontre du maire de Dakar, l’un des principaux opposants au chef de l’Etat et candidat déclaré à la présidentielle de février 2019.
« La condamnation du maire de Dakar par la Cour d’appel le prive de la capacité juridique et de l’autorité morale nécessaires à l’exercice de ses fonctions », selon un rapport du ministre de la Gouvernance territoriale, qui a la tutelle sur les villes, et sur lequel se fonde, notamment, le décret.
La révocation du maire de Dakar a été dénoncée, vendredi, 31 août, par plusieurs défenseurs des droits de l’homme.
« C’est catastrophique à ce stade de la procédure que le président Macky Sall prenne un décret pour révoquer Khalifa Sall. C’est admettre qu’il est (définitivement) fautif alors que les voies de recours ne sont pas encore terminées », a déclaré Babacar Ba, du Forum du justiciable, une organisation de défense des droits de l’homme.
« Khalifa Sall est toujours présumé être innocent. Où sont les conseillers et les juristes du président de la République », s’est demandé Babacar Ba. La défense du maire et son entourage avaient annoncé jeudi un recours devant la Cour suprême après sa condamnation en appel. Mais, selon certaines sources, l’implication de la Cour suprême ne va pas mettre en cause le jugement, mais, examinera si la loi a été respectée.
La Cour d’appel a condamné Khalifa Sall à cinq ans de prison ferme et à verser « solidairement » avec trois de ses sept coaccusés la somme de 1,8 milliard de F CFA (environ 2,75 millions d’euros) à l’Etat du Sénégal.
Khalifa Sall, en détention depuis mars 2017, avait été condamné en première instance pour « escroquerie portant sur des fonds publics » et « faux en écriture », pour le détournement d’environ 2,5 millions d’euros prélevés entre 2011 et 2015 sur les caisses de la Ville de Dakar.
Maire depuis 2009, ce dissident du Parti socialiste (PS) et de la majorité présidentielle affirme que les poursuites judiciaires à son encontre visent à l’empêcher de se présenter à la présidentielle, ce que démentent les responsables de la majorité.
Homme politique populaire de 62 ans, Khalifa Sall est considéré comme l’un des rares adversaires à pouvoir menacer dans les urnes le président sortant, Macky Sall, qui devrait briguer un second mandat en février 2019. Khalifa Sall partage cette posture avec Karim Wade, le fils de l’ancien président, Abdoulaye Wade, qui, malgré son exil à Doha, au Qatar, reste le candidat du PDS (Parti démocratique sénégalais) bien qu’il n’ait pas été admis à s’inscrire sur les listes électorales, ce qui le disqualifie d’office de la compétition.