A la fin du Sommet France-Afrique de Montpellier (8 octobre 2021), Sommet qui se transforma en grand flop, Emmanuel Macron avait annoncé un fonds d’innovation pour la démocratie. 50 millions d’euros (32,5 milliards de F CFA) sur cinq ans furent ensuite débloqués par la France. Le lancement de la Fondation pour l’innovation de la démocratie eut lieu, à Johannesbourg, le 6 octobre 2022. Le Sénégalais, Souleymane Bachir Diagne, et le Camerounais, Achille Mbembe, qui sont chargés d’animer cette Fondation, que pensent-ils de Dramane Ouattara qui, non seulement, a radié Laurent Gbagbo, Tidjane Thiam, Charles Blé Goudé et Guillaume Soro de la liste électorale, mais, s’apprête à briguer un quatrième mandat anticonstitutionnel ?
Leur Fondation s’intéresse-t-elle à la démocratie partout en Afrique, sauf en Côte d’Ivoire ? » Ou bien Ouattara leur semble tellement démocrate qu’il ne mérite pas d’être interpellé ? Ces questions montrent que la Fondation de Bachir Diagne et Mbembe n’a rien d’innovant, que ce machin a été créé pour distraire les Africains et donner à manger à deux affamés et que le binôme n’est rien d’autre que « la caution intellectuelle de la politique française sur le continent » (cf. « Libération » du 18 octobre 2022) (sur notre photo, Macron et Ouattara au Sommet France-Afrique de Montpellier en octobre 2021, deux principaux fossoyeurs de la démocratie en Afrique).

Financer la démocratie, l’apporter aux Africains, comme colons et missionnaires étaient fiers d’apporter hier la « civilisation » et la foi chrétienne, n’a aucun sens quand on sait que « des formes anciennes de démocratie étaient courantes au sein des sociétés humaines, qu’elles l’étaient autant que les autocraties » (cf. David Stasavage, « The decline and rise of democracy. A global history from Antiquity to Today », Princeton, Princeton University Press, 2020). Le grand historien burkinabè, Joseph Ki-Zerbo, en avait déjà fait la démonstration dans « A quand l’Afrique ? Entretien avec René Holenstein » (Editions de l’Aube, 2003). N’est-il pas à la fois mensonger et ridicule de vouloir exporter chez les autres ce qui est déjà mort chez soi-même ? N’est-il pas prétentieux de croire qu’on est dépositaire de la démocratie et que les autres en sont privés ? C’est l’une des questions que pose David Stasavage dans son essai. Je suis entièrement d’accord avec lui quand il affirme : « Nous devons aussi en finir avec l’idée que la démocratie avait été inventée en un lieu donné à une époque précise avant de se diffuser ailleurs » (D. Stasavage, « The decline and rise of democracy. A global history from Antiquity to Today »).

Diagne et Mbembe sont trop occupés à manger l’argent de Macron pour voir et dénoncer les nombreuses atteintes de Ouattara à la démocratie.
Reste à leur souhaiter bon appétit. Mais, les nouveaux avocats de Macron risquent bien de ne pas avoir le temps de digérer lorsque les peuples, fatigués de la cupidité et de la trahison de certains diplômés africains, n’auront plus d’autre choix que de renverser la table.
Jean-Claude Djéréké
est professeur de littérature africaine à l’Université de Temple (Etats-Unis).