Après avoir fait cavalier seul pendant plus d’une décennie en matière de politique étrangère en Afrique, l’Elysée se dit, désormais, prête à écouter les points de vue divergents. En effet, le débat parlementaire sur la stratégie de la France en Afrique annoncé par Emmanuel Macron le 7 septembre dernier aura lieu le 21 novembre prochain. Mais, cette prise de conscience est tout sauf un hasard, puisqu’il aura fallu l’abnégation de plusieurs nations africaines dont le Mali, le Burkina Faso et le Niger, pour faire plier le dirigeant français et ses équipes, la diplomatie traditionnelle effectuée auprès de ces derniers n’ayant pu mener à rien.
La logique aurait d’ailleurs voulu que l’examen minutieux de cette politique extérieure auquel vont se livrer les acteurs majeurs de la vie politique dans l’Hexagone, survenu grâce à l’action de ces trois pays sahéliens leur donne droit à une récompense digne de ce nom, provenant des autres nations du continent africain, lesquelles bénéficieront inéluctablement des retombées découlant de cet aboutissement. Mais, le simple rétablissement de ces Etats dans leurs droits au sein de la CEDEAO serait amplement suffisant, eux qui, jouissent toujours du soutien indéfectible de leurs populations, malgré les intentions perverses qui animaient les sanctions économiques leur ayant été imposées par l’organisation sous-régionale. A en croire que leurs bourreaux n’ont toujours pas reçu le feu vert de l’Elysée pour tourner la page et aller de l’avant.
Il convient, toutefois, de préciser que la démonstration de courage de Bamako, Ouagadougou et Niamey, face à Paris n’aurait probablement pas suffi sans la défection des puissances occidentales réputées alliées de la France, comme les Etats-Unis et les pays membres de l’Union européenne. En effet, la désillusion essuyée lors du meeting en fin août des hauts diplomates des 27 à Toledo fut fatale pour Emmanuel Macron, lui qui venait à peine d’être lâché par son allié de toujours, le président américain, Joe Biden, sur le dossier de l’intervention militaire de la CEDEAO au Niger.
C’était la débâcle de trop pour l’exécutif français, qui fut contraint d’admettre son isolement sur la scène internationale, alors qu’au même moment, ni les différentes juntes militaires d’Afrique de l’Ouest ni leurs populations ne se montraient hostiles à l’égard des autres Européens (Allemands, Italiens), pourtant, bel et bien présents dans ces territoires lors des expulsions successives des troupes militaires françaises. Bien que le choix de ces nations de se désolidariser de la France ait été fortuit, surtout, après des décennies d’alignement sur la politique française en Afrique, il est impératif qu’elles revoient à leur tour, la nature de leurs relations avec les Africains de peur de connaître un sort identique. Ce qui leur serait préjudiciable en cette ère marquée par la place centrale du continent africain dans la transition énergétique en cours.
Le fait que l’Elysée se soit soudainement souvenu de l’existence de l’article 50-1 de la Constitution française relatif à la nécessité de consulter le Parlement sur l’engagement militaire à l’étranger est un bon début. Reste maintenant à voir les résolutions qui naîtront de ce débat, et celles qui seront entérinées par le pouvoir exécutif. Ce qui est d’ores et déjà sûr, c’est que cette actualité sera suivie de tous les Africains où qu’ils soient dans le monde.
Paul-Patrick Tédga
MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)