GUINEE-BISSAU : L’honneur, la dignité et la fierté d’un chef d’Etat (c’est aussi de quitter proprement le siège présidentiel)

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L’ancien président de la Guinée-Bissau, Umaro Sissoco Embaló, s’en est allé de Bissau, capitale du pays, le 27 novembre 2025, par un avion affrété par le gouvernement sénégalais, après un coup d’état militaire, le 26 novembre 2025, mené par le chef d’état major de l’armée de terre, le général, Horta Inta-A Na Man. Il a trouvé refuge à Dakar, au Sénégal, avant de se rendre à Brazzaville, en République du Congo, où il a été accueilli par le président, Denis Sassou Nguesso, dans la nuit du 28 au 29 novembre 2025. De Brazzaville où il a séjourné, moins de quarante huit heures après, Umaro Sissoko Embalo s’est envolé pour Rabat, au Maroc, le 3 décembre 2025.

Les déplacements précipités et l’errance, sans repères précis, de Umaro Sissoco Embalo, entre plusieurs aéroports internationaux africains, ne contribuent pas à renforcer l’image de la fonction présidentielle. Il convient cependant de noter que la situation politique en Guinée-Bissau est complexe et que l’ancien président, Umaro Sissoko Embalo, a été destitué par des forces militaires. Ce qui a pu influencer ses décisions, orientant son comportement vers un processus complexe, qui pourrait avoir été inspiré par de nombreux facteurs, les émotions, l’expérience passée, ou même ses croyances personnelles (Umaro Sissoko Embalo est exfiltré par son désormais ancien homologue du Sénégal, Bassirou Diomaye Faye).

Dans sa logique habituelle, l’Union africaine (UA) et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), ont condamné le coup d’état et suspendu la Guinée-Bissau de leurs instances décisionnelles. Quant à la destination finale de l’ancien président, Umaro Sissoko Embalo, il est, pour le moment, risqué de confirmer s’il gagnera le Portugal, après le Maroc, comme le mentionnent les médias. Mais, il est clair que l’avenir politique de Umaro Sissoko Embalo est branlant et chancelant. Certainement qu’il devra naviguer dans un environnement complexe pour retrouver une position stable.

Telles que les choses se déroulent en Guinée-Bissau, il semblerait que le coup d’état militaire pourrait être une opération montée par l’ancien président, Umaro Sissoko Embalo, lui même, pour contourner ce qu’il penserait être une humiliation de sa part, en laissant le jeu de la démocratie se dérouler avec équité et transparence. Cependant, quoique plausible, il est difficile de confirmer cette thèse, sans plus d’informations.

Mais, à tout prendre, des éléments étayeraient cet argument. En effet, le président déchu, Umaro Sissoco Embaló, avait revendiqué la victoire à l’élection présidentielle du 23 novembre 2025, avec 65% des voix, selon ses propres chiffres, avant même la publication des résultats officiels. Il avait, déjà, tenté de prolonger son mandat en gouvernant par décret, ce qui avait été contesté par l’opposition.

L’arrestation du président, Umaro Sissoko Embalo, et de plusieurs hauts responsables du pays par les militaires pourrait être une tentative de prendre le contrôle de la situation et de légitimer le coup d’état.

De tout cela, il est également possible que le coup d’état soit le résultat de tensions politiques et de rivalités entre les différents groupes au pouvoir, en Guinée Bissau. Le pays a déjà connu plusieurs putsch et tentatives de coup d’état, depuis son indépendance, le 24 septembre 1973, proclamée unilatéralement par le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée- Bissau(PAIGC).

En enseignements du climat politique actuel, en Guinée-Bissau, il est clair que c’est un exemple éloquent de l’importance et de la nécessité pour un chef d’Etat, en fonction, de savoir quitter le pouvoir, de manière digne et honorable. Forcer le destin et refuser de partir peut entraîner des conséquences désastreuses, tant pour le pays que pour l’image du dirigeant lui-même.

Umaro Sissoko Embalo n’a pas su quitter le pouvoir avant que le pouvoir ne le quitte. Résultat, il est devenu un ancien chef d’Etat errant. Après le Sénégal, le Congo-Brazzaville, le Maroc, prochaine destination : Le Portugal ?

Il est essentiel pour les chefs d’Etat africains de comprendre que leur rôle est temporaire et que leur légitimité repose sur le service qu’ils rendent à leur peuple, et non sur leur propre personne. La tentation de s’accrocher au pouvoir est grande, mais, elle peut être fatale pour la stabilité et la prospérité du pays.

Une sortie louable, respectable et majestueuse d’un chef d’Etat permet de préserver son héritage, de maintenir la stabilité du pays et de faciliter, sans heurts, une alternative nouvelle ou un nouveau leadership. C’est un acte d’élévation, de sagesse et de maturité qui devrait être encouragé et valorisé.

Autour d’un chef d’Etat, les chants des sirènes flatteurs et opportunistes, d’apparence séduisants et attrayants, sont souvent trompeurs et dangereux. Ils peuvent mener au désastre. Les chefs d’Etat doivent être capables de résister à ces tentations et de prendre des décisions qui servent l’intérêt supérieur de leurs pays et de leurs peuples.

Joseph Ouabari Mariotti

Ancien Garde des Sceaux du professeur Pascal Lissouba

Ancien président du Congo-Brazzaville

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