A part la Centrafrique et le Mali, qui se veulent des vitrines de la présence russe en Afrique, une grande partie du continent africain échappe aux ambitions de la Russie.
Madagascar, l’Egypte, la République du Congo, laTanzanie, le Cameroun (très récemment) ou la Lybie, ont signé des accords de coopération militaire ou achètent des armes à la Russie. Des accords agricoles concernant les importations de blé ont été conclus. Certains pays africains ne peuvent se passer du blé car leur stabilité politique en dépend.
La Russie n’est pas pour autant considérée comme un » pays frère « , même si elle a soutenu pendant la décolonisation des mouvements comme le FLN (Algérie) ou en Afrique du Sud, l’ANC.
L’abstention et le refus de participer au vote des Etats africains concernant la résolution de l’Assemblée Générale des Nations-Unies condamnant l’invasion russe, ont été motivés par la crainte d’une rupture des importations de blé. Ils ne doivent pas être interprétés comme une acceptation de l’invasion de l’Ukraine. Les Etats africains et l’Union africaine sont très attachés au principe d’intangibilité des frontières.
Les réseaux sociaux et agences de presse pro-russes nombreux et actifs sur l’ensemble du continent, diffusent une profusion de messages hostiles à la France, aux Etats-Unis et à l’Occident et alimentent le sentiment anti-colonial de certains milieux politiques et d’une partie de l’opinion publique africaine.
Mais, ils ne parviennent pas pour autant à favoriser une avancée significative de la Russie en Afrique (sur notre photo le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov est reçu par le président égyptien le 25 juillet au Caire. Il vient certainement conquérir de nouveaux marchés).
Le comportement brutal des supplétifs de la Russie, des mercenaires de la société Wagner, en particulier, mais pas uniquement, ternit l’image de la Russie. Les mercenaires de Wagner n’ont pas fait non plus la preuve de leur efficacité contre les milices en Centrafrique et au Mali contre les djihadistes. De tout temps, les étudiants africains accueillis sur le territoire russe ont été victimes d’actes et de propos racistes de la part de la population. Ils préfèrent aller en Europe et aux Etats-Unis.
Les rencontres entre les chefs d’Etat africains et Vladimir Poutine et la tournée africaine du Ministre russe des Affaires étrangères, sont destinés à faire croire à une percée russe sur le continent.
L’action de la Russie en Centrafrique et au Mali n’est pas une réussite. La Russie n’a ni les moyens financiers, ni les moyens militaires de s’imposer en Afrique. Aux prises avec » l’Opération spéciale en Ukraine « , elle entretient l’illusion d’un intérêt pour le continent africain en agitant la promesse de livraisons de blé.
La tournée et les propos de Sergueï Lavrov sonnent comme un aveu de faiblesse. La Russie a des concurrents sérieux sur le continent : la France, la Chine, les Etats-Unis, la Turquie…
La visite du président français en Afrique marque le retour de la France, qui s’était retirée du jeu politique de cette région du monde. Emmanuel Macron n’a pas mis en place, pendant son premier mandat, les bases d’une politique africaine ambitieuse à la mesure des enjeux du continent.
Patrick David
Docteur en droit