CENTRAFRIQUE : Avec la destitution de Karim Meckassoua de la présidence de l’Assemblée nationale, le pays retrouve ses vieux démons

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Les milices musulmanes ne pouvaient pas laisser passer ce qu’elles considèrent comme une « injustice » à l’endroit d’un des leurs : la destitution de Karim Meckassoua de la présidence de l’Assemblée nationale passe mal. L’ex-Séléka, par exemple, annonce une guerre qui ne dit pas son nom mais qui en est une. En effet, elle a donné, samedi, 27 octobre, un ultimatum de 48 heures aux représentants de l’Etat centrafricain pour quitter les zones du pays sous son contrôle. Cette menace que Bangui ne prend pas à la légère car tout le monde sait qui est Séléka, n’est pas une bonne affaire pour le pouvoir du président, Faustin Archange Touadera dont on ignore tout, absolument tout, de sa stratégie.

« Les représentants de l’Etat en poste dans les zones occupées par les groupes armés de l’ex-Séléka ont 48 heures pour partir de ces zones », a déclaré Abdoulaye Hissene, leader de l’ex-Séléka et actuel président du Conseil national de défense et de sécurité (CNDS), une formation militaire regroupant différents groupes armés de l’ex-Séléka.

Vendredi, 26 octobre, soir, le président de l’Assemblée, Karim Meckassoua (sur notre photo avec le président Faustin Archange Touadera), a été destitué par les députés centrafricains. Karim Meckassoua est le député du troisième arrondissement de la capitale, Bangui, qui comprend le PK5, le quartier abritant la majorité des musulmans de Bangui.

Sa destitution est « illégale », a dit Abdoulaye Hissène, ajoutant qu’il « n’a commis aucune faute grave qui justifie qu’il soit destitué par ses pairs ».

« Pour nous, c’est parce qu’il est tout simplement musulman », a-t-il ajouté.

Cela dit, le gouvernement n’est pas d’accord et crie à la manipulation : « Ceux qui ont entamé la procédure de destitution ont évoqué des problèmes de gestion. A aucun moment la question confessionnelle n’a été évoquée », a (tardivement) réagi, samedi, 27 octobre, Ange-Maxime Kazagui, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement. « La démocratie a joué son rôle à l’Assemblée, nous déplorons que certains saisissent cette opportunité pour remettre en cause le dialogue et la cohésion sociale », a-t-il ajouté.

Depuis que le président, Faustin-Archange Touadera, s’est installé au Palais de la Renaissance, il est muet comme une carpe : il ne sait pas communiquer et seules quelques personnes (généralement les initiés) savent ce qu’il fait et pourquoi il le fait. La destitution du président de l’Assemblée (acte grave dans un Etat) est survenue dans ce contexte, sans qu’on sache, exactement, pourquoi, et surtout, les désaccords qui existaient entre les deux hommes. Certes, les rumeurs circulent dans les réseaux sociaux. Mais que valent-elles ?

Après le déferlement de haine entre rebelles de la coalition Séléka à dominante musulmane et groupes antibalaka prétendant défendre les chrétiens du Sud à partir de 2013, l’élection de Karim Meckassoua au perchoir, en 2016, était apparue comme un symbole de réconciliation en Centrafrique, dirigée par un chrétien, Faustin-Archange Touadéra. C’était plutôt une bonne chose que le Centrafrique retrouve ce semblant de paix après la descente aux enfers qu’il avait connue quelque temps auparavant. Toutes les leçons ont-elles été tirées ? On en doute !

Ajoutons que dans ce pays où l’influence politique reste en partie communautaire, les relations entre les deux hommes n’ont jamais été bonnes.

En Centrafrique, l’Etat ne contrôle qu’une petite partie du territoire : depuis 2013, la quasi-totalité de celui-ci vit sous la coupe de groupes armés, dans un pays de 4,5 millions d’habitants classé parmi les plus pauvres au monde mais riche en diamants, or et uranium.

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