CENTRAFRIQUE : Le groupe armé 3R est-il un obstacle à la paix et à la réconciliation ?

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Le groupe armé 3R (Retour, Réclamation et Réhabilitation ) qui, à l’origine, s’est constitué dans le but de protéger la minorité peule contre l’attitude hostile des populations sédentaires et les attaques des milices chrétiennes (anti-balakas ) fait régulièrement la une des médias, à défaut de susciter les commentaires d’une classe politique centrafricaine plutôt muette et prudente sur le sujet.

S’il n’est pas le seul groupe armé à braver le pouvoir central, c’est un des plus puissants et des plus actifs qui n’hésite pas à s’opposer à l’arme lourde aux forces onusiennes et à tirer sur les soldats de la MINUSCA et de la FACA (Forces armées centrafricaines).

Il est intéressant de souligner que les 3R se sont retirés de l’accord de paix signé à Karthoum en février 2019 avec le gouvernement centrafricain (sur notre photo Abbass Siddiki saluant Faustin Archange Touadéra et Omar el Béchir à Bangui le 6 février 2019 lors de la signature de l’accord)..

Ce groupe est essentiellement composé de peuls et dirigé par un peul de nationalité camerounaise : Abbas Siddiki.

Le groupe rebelle prétend vivre des taxes levées sur les populations peules qui pratiquent la transhumance en contrepartie de sa protection et se présente comme une milice d’auto-défense.

En réalité, les 3R se livrent à des exactions et rakettent les populations. Cela a permis à Abbas Siddiki d’acheter des armes et de s’installer dans le Nord-Ouest du pays en chassant, sans ménagement, les populations qui s’y trouvent.

Ce comportement des 3R dessert la cause de la communauté peule qui rencontre des problèmes réels avec les agriculteurs qui les accusent de ne pas respecter les couloirs traditionnels de transhumance et d’endommager leurs exploitations. De leur côté, les éleveurs et les gardiens de bétail peuls se plaignent de vols de bétail. Ces accusations parfois justifiées conduisent à des affrontements récurrents et d’une rare violence.
 
Les relations entre les peuls nomades et les populations sédentaires ont, depuis tout temps, été tendues. Les 3R les attisent en dressant les communautés les unes contre les autres, saisissant le moindre prétexte pour alimenter la rumeur et nourrir les peurs.

Abbas Siddiki est le chef d’une milice qui sert ses ambitions personnelles : sa soif de pouvoir. Champion du double jeu, soufflant le chaud et le froid, il se comporte en parrain, en chef de gang.
 
Il a installé ses bases dans le Nord-Ouest du pays où l’Etat est totalement absent. 
Il y a instauré un climat de terreur et y règne en maître. Il semble vouloir étendre son influence à l’Ouest afin de percevoir encore plus de taxes et tirer des ressources des mines se trouvant dans la région. 

La MINUSCA veut mettre un terme aux visées expansionnistes du groupe 3R afin d’ éviter une sécession de fait qui serait une atteinte grave l’intégrité du territoire. 

Il ne faudrait pas que Abbas Siddiki fasse des émules parmi les autres responsables de milices, aggravant le chaos qui frappe la Centrafrique. 

Les 3R sont, à l’évidence, un obstacle à la paix et à la réconciliation.

Patrick David 
est docteur en droit.

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