DEUXIEME GUERRE MONDIALE : Trump un petit faussaire qui tente maladroitement de réécrire l’histoire

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Le 7 mai 2025, le président américain, Donald Trump, a affirmé sur « Truth Social » que la victoire de la Seconde Guerre Mondiale avait été obtenue grâce aux Etats-Unis. Il va sans dire que cette relecture historique minimise le rôle joué par les autres alliés et par l’URSS en particulier. Pour  nous, Trump  fait  fausse route en réinterprétant  l’histoire  sous  un  prisme  strictement américain. Voici pourquoi.

Le poids écrasant du Front de l’Est dans la défaite allemande

L’un des éléments les plus occultés dans les récits contemporains est l’ampleur du conflit sur le Front de l’Est. Si l’on compare les pertes humaines et matérielles entre les différentes régions de combat, il est indiscutable que l’essentiel de l’effort de guerre allemand a été dirigé contre l’Union soviétique. En 1941, l’Opération Barbarossa engagea près de 3 millions de soldats allemands dans une invasion massive de l’URSS. Les batailles qui s’ensuivirent furent d’une rare violence. A Stalingrad, entre 1942 et 1943, plus de 2 millions de soldats et civils perdirent la vie. Cette défaite allemande marqua un tournant majeur. A Koursk, en 1943, la plus grande bataille de chars de l’histoire vit l’échec définitif des offensives allemandes sur le Front de l’Est. Raymond Aron note que la Wehrmacht perdit l’essentiel de ses troupes sur ce front avant même que l’Opération Overlord (le débarquement en Normandie) ne commence en juin 1944 (cf. “Paix et guerre entre les nations”, Calmann-Lévy, 1962). Il ne s’agit pas ici de minimiser le rôle des alliés occidentaux, mais, de rappeler que lorsque ceux-ci ont ouvert un second front, l’armée allemande était déjà affaiblie et en pleine retraite sous la pression soviétique (sur notre photo, l’armée du 3e Reich qui voulait conquérir toute l’Europe).

L’évolution du discours historique sous l’influence géopolitique

La réécriture du rôle de l’URSS dans la Seconde Guerre Mondiale s’explique en grande partie par la Guerre Froide et les tensions entre les Etats-Unis et l’Union soviétique après 1945. Dès la fin du conflit, la rivalité entre les deux Blocs a poussé les Etats-Unis à minimiser la contribution soviétique dans la guerre contre Hitler. La propagande occidentale a insisté sur le débarquement allié en Normandie comme élément décisif, mettant en avant l’image d’une libération par les troupes américaines. En 1946, Winston Churchill dénonçait déjà l’URSS dans son célèbre discours sur le « rideau de fer ». La guerre idéologique, qui en découla, influença la perception du passé. En URSS, la victoire soviétique fut exaltée comme le fruit du courage du peuple et du génie militaire de Staline, tandis qu’en Occident, les médias et les gouvernements cherchaient à réduire la portée de cet exploit pour éviter de renforcer la légitimité du régime soviétique. Après la chute de l’URSS en 1991, cette tendance s’est encore accentuée. Les Etats-Unis et l’Europe ont progressivement reconstruit un récit où la victoire contre Hitler est principalement attribuée aux forces alliées occidentales, reléguant les sacrifices soviétiques au second plan. 

Le bilan humain et matériel : une disparité flagrante

Les chiffres attestent de l’ampleur du sacrifice soviétique. L’URSS a perdu entre 26 et 27 millions de personnes dans la guerre, dont une grande majorité de civils. A titre de comparaison, les Etats-Unis ont perdu environ 400 000 soldats, et la France environ 600 000 personnes. Sur le plan matériel, la guerre fut un désastre pour l’Union soviétique, qui vit des milliers de villes et villages rasés, et son industrie presque anéantie par l’invasion allemande. Pourtant, malgré ces pertes gigantesques, l’Armée rouge parvint à reconstituer sa puissance militaire et à mener une offensive massive jusqu’à Berlin en mai 1945, mettant fin à la guerre en Europe. Les armées alliées occidentales ont certes joué un rôle majeur, notamment, en Italie et en France, mais il est historiquement erroné de prétendre que la victoire contre Hitler fut principalement américaine. C’est bien sur le front de l’Est que l’armée allemande a été saignée à blanc et mise en déroute. Le narratif qui attribue la victoire sur Hitler principalement aux Etats-Unis est une simplification qui occulte   les véritables dynamiques   du conflit. Le rôle de   l’URSS fut crucial dans l’effondrement du IIIe Reich. Raymond Aron a mis en évidence cette réalité dans “Penser la guerre, Clausewitz”  (Paris, Gallimard, 1976). Ce livre contredit donc le discours politique et médiatique actuel qui tend à réécrire cette période sous une lumière favorable aux intérêts occidentaux. Cette réinterprétation sert à légitimer une vision de l’Histoire qui renforce la position des Etats-Unis comme sauveurs de l’Europe, tout en atténuant   la contribution soviétique. Reconnaître le poids du   sacrifice soviétique n’est pas un geste idéologique, mais une exigence historique pour comprendre la complexité de la Seconde Guerre Mondiale.

C’est le lieu de rappeler   que, dans les  années   1930, les  Etats-Unis  avaient une politique isolationniste. Le pays, qui avait fermé ses frontières, ne comptait pas s’engager dans la guerre auprès des alliés, malgré la volonté du président, Franklin D. Roosevelt. Il faudra attendre l’attaque-surprise du Port de Pearl Harbor par l’aviation japonaise, le 7 décembre 1941, pour que les Etats-Unis déclarent, dès le lendemain, la guerre au Japon et aux puissances de l’Axe.

Jean-Claude DJEREKE

est professeur de littérature africaine à l’Université de Temple (Etats-Unis).

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