Décidément, Denis Sassou Nguesso adore se moquer des jeunes Congolais. En effet, à l’occasion de son message de vœux de ce 31 décembre 2023, il a décrété 2024 Année de la Jeunesse. Une grosse expression pour rien quand on connaît le personnage. Une annonce, qui sonne creux aux oreilles de ses concitoyens en âge de travailler, mais délaissés, qui depuis des décennies (il totalise une quarantaine d’années au pouvoir) n’ont eu droit qu’à des interminables promesses politiques. La seule innovation du dictateur étant, ici, de décréter, pour la toute première fois, une année entière à la jeunesse. Peut-on vraiment s’attendre à ce que les choses changent ? Absolument pas.

Avec un taux de chômage jeune de 42% selon des statistiques de la Banque mondiale, l’économie du Congo continue de répondre aux abonnés absents sur le plan de l’insertion professionnelle des nouveaux diplômés, soit, parce que les formations choisies par eux ne cadrent pas avec les besoins des entreprises, soit, parce qu’ils ne sont pas informés en temps réel des vagues de recrutements initiés par les employeurs. Ce qui amène à s’interroger sur le rôle des ministères du Travail, de l’Enseignement supérieur, et de la Formation qualifiante depuis tout ce temps, qui sont censés mener des actions coordonnées afin d’accompagner les détenteurs de diplômes supérieurs vers la vie active. Mais, à vrai dire, le problème vient du sommet de l’Etat. De Sassou-Nguesso lui-même (sur notre photo, le 2 octobre 2018, le ministre congolais du Commerce, des Approvisionnements et de la Consommation, Claude N’Silou, avait pris une circulaire pour interdire les promotions de ventes de boissons alcoolisées, qui font des ravages chez les jeunes, comme le montre notre photo. Sa circulaire est restée sans effet).

En effet, en 2016, fraîchement investi président de la République, il avait fait de l’intégration des jeunes dans le monde du travail, l’un des principaux piliers de son quinquennat, et avait, dans cette lancée, créé le Conseil consultatif de la jeunesse, lequel avait pour mission de porter les aspirations des jeunes auprès des institutions étatiques. Cependant, depuis son existence, cet organe intermédiaire n’a pu faire pour les jeunes diplômés au chômage, si ce n’est de les accompagner dans l’obtention de formations, totalement, éloignées de leurs domaines de compétence. C’est ainsi que de nombreux cerveaux congolais sont obligés de se tourner vers le secteur du transport de voyageurs ou le secteur informel pour éviter la famine. Résignés face à leur situation, ces jeunes n’ont guère besoin d’être davantage méprisés, mais, il semblerait que Denis Sassou Nguesso prenne un malin plaisir à le faire.

Occupé pendant des décennies à transformer le Congo-Brazzaville en un État Mbochi, le leader de l’ethnie Mbochi, Sassou Nguesso, ne pouvait vraisemblablement pas s’atteler à éradiquer le chômage des jeunes Congolais. Tous les moyens de l’Etat, pour l’essentiel, finançaient ses projets pharaoniques en faveur de son fameux Etat mbochi : l’hôpital Edith Bongo Ondimba, la filiale de la BEAC (Banque des Etats de l’Afrique centrale) dans une partie du pays qui ne compte aucune industrie, au mieux, quelques entreprises et commerces, le Pefaco Hôtel Alima Palace avec ses 5 étoiles dont le taux de remplissage atteint rarement 5%, le Port sur le fleuve Alima dont l’utilité est nulle, l’aéroport international d’Ollombo en pleine brousse où ne se pose que l’avion du dictateur, en moyenne, une fois par mois, quand il vient en séjour de villégiature, etc. Ayant enfin pu parvenir à cet objectif sordide, il semble maintenant plus enclin à penser aux futures générations ? On en doute au regard de son incapacité notoire à respecter sa parole. D’autre part, son expertise hors pair en manipulations diverses rend douteux tout engagement pris par lui, et ce, en dépit de sa qualité de président de la République.

Paul-Patrick Tédga

MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)