ETATS-UNIS/EUROPE : Constitution d’un front anti-Trump en Allemagne et en France sur fond de désaccord entre eux

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Donald Trump est un chef d’Etat pour le moins imprévisible et inclassable. Il est difficile de savoir par où le prendre. En France et en Allemagne, deux pays moteurs de l’Union européenne, le cas Trump commence à être étudié dans les universités. Au niveau du sommet des Etats aussi : pour preuve, Angela Merkel et Emmanuel Macron vont s’organiser en front uni face à Donald Trump et aux populismes, malgré de persistants désaccords entre eux sur le fond.

Le président français et la chancelière allemande avaient, déjà, multiplié, lors des cérémonies en France du centenaire de la fin de la Première guerre mondiale, les marques de complicité et de cohésion.

Pour parachever cette séquence commémorative, Emmanuel Macron a été reçu, à Berlin, dans le cadre du Volkstrauertag (Jour du Souvenir), journée de commémoration nationale en Allemagne dédiée à la réconciliation, à l’entente et à la paix, mais aussi, d’hommage aux victimes de la guerre.

Après des cérémonies avec le président allemand, Frank-Walter Steinmeier, dont le rôle est surtout honorifique, Emmanuel Macron s’est exprimé devant la chambre des députés à 12h30 GMT, une première pour un président français depuis Jacques Chirac en juin 2000.

Le président français est revenu sur son projet d’armée européenne, auquel la chancelière a, ostensiblement, apporté son soutien, mardi, 13 novembre, au Parlement européen, malgré l’ire qu’il suscite chez le président américain Donald Trump.

Autres sujets de friction : Donald Trump est sorti de l’Accord Climat signé par Barack Obama, à Paris, dans le cadre de la COP 21. Il est sorti de l’Accord iranien et s’organise pour relancer les hostilités contre Téhéran. Il multiplie les taxes sur les produits européens et refuse de respecter les règles de l’OMC. Bref, Donald Trump, par son comportement, a réussi à favoriser le front uni Paris-Berlin contre lui (notre photo).

C’est dans ce cadre que dans la foulée du discours au Bundestag, Emmanuel Macron et Angela Merkel ont tenu une réunion de travail sur les moyens de relancer la construction européenne.

Les deux pays se sont entendus sur les contours d’un budget pour la zone euro, projet phare d’Emmanuel Macron pour soutenir l’investissement. Mais, pas sur son montant, qui reste non défini alors que le chef de l’Etat français espérait à l’origine des centaines de milliards d’euros.

L’Allemagne n’en a accepté le principe que du bout des lèvres et en verrouillant son utilisation, d’autant plus qu’en matière de contribution, les caisses publiques françaises étant à sec, c’est sur l’apport de l’Allemagne que compte Emmanuel Macron pour constituer ce budget de la zone euro.

Dans un contexte de poussée populiste, y compris en Italie, pays fondateur de l’Union européenne, les deux dirigeants ont, néanmoins, tout intérêt à se montrer unis et à donner un « nouvel élan » au couple franco-allemand, selon les termes du président du Bundestag, Wolfgang Schäuble.

« Le contexte européen nous oblige à être encore plus rapides et à avoir encore plus de résultats », met en garde la présidence française, à six mois des élections européennes.

Car l’unité de façade voulue par les deux dirigeants français et allemand ne masque pas les désaccords de fond qui perdurent, que ce soit sur la défense européenne, la réforme de la zone euro ou encore la taxation des géants du numérique.

Les échanges acides entre les deux pays au sujet des ventes d’armes à l’Arabie saoudite ont, déjà, jeté une ombre fin octobre.

En France, mais aussi, en Allemagne, des voix se sont, aussi, élevées pour regretter que les ambitions de relance européenne affichées par M. Macron après son élection en 2017 n’aient pas été saisies au bond par Mme Merkel, au pouvoir depuis 13 ans et sur le départ en 2021 au plus tard.

Le plaidoyer commun en faveur d’une armée européenne doit, également, passer de la théorie à la pratique.

Angela Merkel, qui est restée très vague sur ce sujet, a, simplement, prévenu qu’une telle armée ne devrait pas être constituée « contre l’OTAN ». Quid de l’indépendance (militaire) de la France prônée par de Gaulle, qui en a pris un coup après l’intégration de la France dans l’OTAN !

Les projets franco-allemands d’armement, tels que le programme Scaf d’avion de combat du futur, censé remplacer, en 2040, les Rafale et Eurofighter, devront être concrétisés.

Un autre point de friction de part et d’autre du Rhin concerne la taxation des « GAFA » (Google, Apple, Facebook, Amazon), les géants du numérique qui ne paient quasiment pas d’impôt en Europe.

Angela Merkel, dans son discours à Strasbourg, a, clairement, plaidé dans l’immédiat, en faveur d’un accord international sur la fiscalité, alors que M. Macron espérait l’adoption, dès décembre, d’une directive européenne sur le sujet.

Bref, on est prêt à répondre à la guerre lancée par Trump, mais, on est, encore, très loin de s’accorder sur le minimum à donner pour la réussir.

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