C’eût été facile qu’après avoir scellé leur union, le 16 août, soit onze jours avant l’élection présidentielle, les trois grands candidats, Guy Nzouba Ndama, Casimir Oyé Mba et Jean Ping (notre photo), se voient offrir le Palais du Bord de Mer, à l’issue de l’élection du 27 août. Ce ne sera pas pour tout de suite, le chemin menant au paradis étant, encore, parsemé d’embûches. Rien ne leur sera offert sur un plateau en argent. A eux de savoir, sans perdre une seconde, repartir au front, pour récupérer leur pouvoir que Bongo Ondimba Ali (BOA) a, momentanément, confisqué, avec le soutien actif de sa belle-mère, Marie Madeleine Mborantsuo, présidente de la Cour constitutionnelle.
BOA vient de gagner une (petite) bataille en usant et abusant des moyens de l’Etat, qui sont mis à sa disposition. Il est très très loin d’avoir gagné la guerre, qui ne fait que commencer. A la guerre comme à la guerre, il revient, désormais, à l’opposition d’utiliser ses moyens à lui, y compris, anti-démocratiques, pour faire respecter le vote des Gabonais. Personne à Washington, ni à Paris, à Bruxelles, ou à New York, ne le lui contestera, véritablement, après avoir vu comment BOA et Mborantsuo ont gagné cette élection.
Quelques vérités de La Palice : Le pouvoir de BOA n’est plus assis sur du solide. Le grand PDG n’est plus qu’un repère de militants démotivés par celui qu’ils appellent, pompeusement, le distingué-camarade. BOA, contrairement au patriarche (bien aimé) ne peut plus, par les temps qui courent, se baser sur une administration solide et soudée quand on sait qu’elle est, tout le temps, en grève, démotivée par sa mal-gouvernance. BOA ne compte pas non plus sur un tiroir-caisse asséché par des détournements massifs de ses émergents ; le baril dont le niveau est bas couvre à peine les dépenses de souveraineté. Aussi bizarre que cela soit, le pouvoir de BOA repose, uniquement, sur sa seule garde républicaine (entre 1.000 et 2.000 personnes) et ses mercenaires étrangers. Autrement dit, BOA, à l’analyse, n’est plus rien. N’est plus soutenu par grand monde, même s’il peut compter, encore, sur quelques forces de défense et de sécurité, manipulées par des généraux corrompus par le gain facile. Cette situation ne va pas perdurer non plus.
L’opposition a, donc, toutes les cartes en main : la paralysie de l’administration et de l’économie par des grèves (à commencer par le secteur pétrolier à Port-Gentil), le report de la rentrée scolaire jusqu’à la libération des syndicalistes, arbitrairement, emprisonnés, le blocage de l’Université Omar Bongo de Libreville jusqu’au paiement de tous les arriérés de bourses, etc. Il y aurait cent actions à mener les unes différentes des autres pour rendre le Gabon de BOA ingouvernable.
Bref, l’opposition ne peut plus reculer. Elle n’a plus que le choix d’avancer, conscient qu’il est impossible de faire une omelette sans casser les œufs. C’est ce culot qui a permis à BOA d’arracher le pouvoir en 2009 alors qu’il n’était pas le candidat le plus côté du PDG. C’est ce même culot qui lui permet, aujourd’hui, de braver la communauté internationale et le peuple gabonais, en prolongeant, momentanément, son bail au Palais du Bord de Mer.