YAYI BONI : « Assainir notre environnement macro-économique »

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Pour le président de la BOAD (Banque ouest-africaine de développement), Yayi Boni, c’est en poursuivant les réformes de leurs économies que les pays de la zone franc tireront le meilleur avantage de l’arrimage de leur monnaie à l’euro.

Afrique Education : Quels sont les avantages qu’offre l’euro aux pays de la zone franc ?

Yayi Boni : D’abord sur le plan commercial, les pays de la zone franc orientent essentiellement leur commerce extérieur vers les pays de l’Union européenne, pour la plupart, et de manière fondamentale, avec les 12 pays de la zone euro. Et si nos partenaires européens ont décidé le rattachement du f cfa à l’euro, c’est parce que leur commerce extérieur avec les pays de la zone franc représente plus de 60% de leurs exportations et de leurs importations vers l’étranger. En outre, les investissements réalisés par les opérateurs économiques de l’euroland dans les pays de la zone franc, représentent les 3/4 du total de leurs investissements en Afrique. A cela s’ajoute la parité fixe entre le franc cfa et l’euro qui garantit la stabilité monétaire. Donc, l’Europe fera plus d’Afrique et l’Afrique fera plus d’Europe en terme de marché. Car, l’euroland aujourd’hui, a comme prolongement du marché européen, l’Afrique, et la zone franc en particulier. Du point de vue captation des capitaux extérieurs, cette coopération monétaire constitue un facteur d’attraction des capitaux extérieurs dans la zone franc, surtout, pour des secteurs comme le pétrole, les mines, l’eau, l’électricité et les télécommunications. A condition que ces pays acceptent de les privatliser et d’élaborer des politiques économiques basées sur la transformation locale de leurs matières premières, gage d’une valeur ajoutée certaine. Je rappelle que la zone franc représente quelque 100 millions de consommateurs, c’est-à-dire, un marché important pour nos partenaires européens.

A la faveur d’une meilleure politique d’assainissement de l’environnement macro-économique, de renforcement des infrastructures et de l’appareil judiciaire et juridique, de politiques budgétaires rigoureuses et d’un environnement politique stable, les pays de la zone franc peuvent également attirer les capitaux européens, notamment, ceux des pays membres de l’euroland vers les secteurs de transformation des produits agricoles locaux pour les vendre au plan régional. Tout comme ils peuvent les exporter vers l’Europe, qui ouvre de plus en plus son marché aux pays africains.

Certains experts affirment néanmoins qu’un euro fort peut entraîner une nouvelle dévaluation du f cfa…

Lorsque l’euro a été créé et introduit le 1er janvier 1999, certains économistes ont dit que c’est une mauvaise affaire pour les pays de la zone franc, et que la nouvelle monnaie unique européenne sera forte. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. L’euro ne vaut pas un dollar actuellement. Cela dit, un euro qui se déprécie est une bonne affaire pour des pays qui exportent parce que leurs produits deviennent compétitifs sur le marché international. Mais lorsque l’euro se déprécie et que la facture énergétique est libellée en dollar, ce n’est pas une bonne affaire pour la majorité des pays de la zone qui ne produisent pas du pétrole. Parce que nous n’avons pas un tissu industriel solide. C’est pareil pour le service de la dette. Si on ne fait pas des réformes nécessaires pour bénéficier rapidement des mécanismes d’allégement de la dette auprès de nos partenaires au développement et des institutions multilatérales (Fmi, Bm), – le service de la dette est payé en dollar ou en DTS (droits de tirage spéciaux) – on risque d’avoir de mauvaises surprises. Il faut souligner que nous perdons aussi près de trois points de croissance dans l’importation des denrées alimentaires, les céréales, essentiellement. Pendant longtemps, on a cru qu’il y avait une corrélation positive de la croissance économique chez noz partenaires au profit de nos pays. Or, très souvent, on s’est rendu compte que, quand la demande est forte, l’offre devient abondante parce que la demande aujourd’hui se porte surtout vers les technologies de pointe du fait de la mondialisation. Un euro trop fort aussi par rapport au dollar, produit les mêmes effets. Donc, nous ne pouvons que raisonner en terme de stabilité de l’euro. L’euro sera de toute évidence une monnaie stable parce qu’elle est soutenue par une puissance commerciale. Et avec l’élargissement de l’Union européenne, cette monnaie deviendra forcément la monnaie de toute l’Europe. La stabilité de l’euro induira forcément celle du f cfa. En outre, je pense que les investisseurs européens auront beaucoup à gagner en venant investir chez nous en Afrique et, notamment, dans les pays de la zone franc. Aujourd’hui, l’Afrique est reconnue comme le continent où le retour sur investissement est le plus élevé.

Propos recueillis par MYS.

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