Interpellé, vendredi, 28 octobre, dans une affaire de trafic de drogue présumé, le patron des patrons du Bénin, Sébastien Ajavon (notre photo), a passé, hier soir, sa quatrième nuit à la gendarmerie, dans l’attente d’une décision du parquet sur la suite de la procédure sur cette affaire de drogue découverte dans son container de marchandises au Port de Cotonou.
L’homme d’affaires, qui préside le patronat béninois et surnommé « le roi du poulet » pour avoir fait fortune dans l’agro-alimentaire, était arrivé troisième, avec 22% des voix au premier tour de l’élection présidentielle de mars au Bénin. Il s’était rallié au deuxième tour à Patrice Talon, devenu président. Il n’est, donc, pas n’importe qui au Bénin, et ce à double titre : homme d’affaires à succès, il va, à nouveau, briguer la présidentielle, dans moins de cinq ans, Patrice Talon ayant déclaré qu’il ferait un seul et unique mandat. Ceci explique-t-il cela ? Au Bénin, pays du vodou, rien n’est impossible.
Sébastion Ajavon a dénoncé un complot, lors d’une conférence de presse avant son arrestation. Sans nommer pour le moment ce commanditaire qui le fait descendre dans cet enfer, il a été arrêté, vendredi soir, avec trois de ses employés, après la découverte, le matin au port de Cotonou, de près de 14 millions d’euros (9 milliards de F CFA) de drogue dans un conteneur chargé de cartons de gésiers de dinde, destiné à sa société Comon SA. Au Bénin, Ajavon est, communément, appelé le « roi du poulet ».
La gendarmerie avait déclaré à la presse avoir « retrouvé dans le conteneur environ 18 kg de cocaïne pure d’une valeur estimée à environ 9 milliards de francs CFA ».
Sébastien Ajavon avait, aussitôt, tenu une conférence de presse dans un hôtel de Cotonou, dénonçant un complot contre lui.
« Nous recevons des centaines, des milliers de conteneurs. Comment est-ce qu’ils ont su que dans un seul conteneur il y avait de la drogue ? C’est une manière de voyou puisque les plombs qui étaient sur les containers n’étaient plus là », avait déclaré Sébastien Ajavon. Question : qui a intérêt à enlever les plombs pour enfouir de la drogue dans le container d’Ajavon ? C’est le mystère que doivent dénouer les enquêteurs de la gendarmerie.
« On m’avait déjà prévenu ces derniers temps qu’ils allaient essayer de me mettre quelque chose pour me créer des ennuis », avait-il ajouté. « On », c’est qui ? Ajavon n’en dit pas plus.
Interpellé dès la fin de sa conférence de presse, Sébastien Ajavon est retenu, depuis, dans les locaux de la compagnie de gendarmerie à Cotonou.
Ses avocats dénoncent une détention arbitraire et de nombreux « vices de procédure ». Ils assurent que leur client n’a pas été entendu dans le respect des règles.
« Aucune notification de garde-à-vue ni de charge ne lui a été faite » a insisté Jacques Migan, porte-parole du collège d’avocats.
Au Bénin, la garde-à-vue peut durer jusqu’à huit jours pour une affaire de trafic de drogue.
« En raison des besoins de l’enquête, des mesures de placement en garde à vue ont été prononcées et ont dû être prorogées à l’encontre des personnes mises en cause » a expliqué, lundi soir, à la presse, Badirou Lawani, procureur de la République du tribunal de première instance de Cotonou.
Il s’agit d’une affaire à risque. Pour l’heure, aucun homme politique ne s’est prononcé, l’affaire étant, encore, entre les mains des enquêteurs. Nul doute que le président du Bénin, Pascal Talon, lui aussi, la suit de très près, désireux de savoir, exactement, de quoi elle retourne. Car elle ne peut qu’intriguer.