Comme toute information impliquant le Mali et le Burkina Faso, la nouvelle de la signature, le 19 juin, d’un accord de prêt entre le Niger et la Banque ouest-africaine de développement (BOAD) a fait le tour de la toile. Certains l’accueillant favorablement, d’autres étant bien plus critiques. Pour la BOAD, en tout cas, rien ne change. Soutien avéré de l’AES (Alliance des Etats du Sahe), elle poursuit sa mission auprès du bloc, à l’image des 50 milliards de F CFA accordés à la Sonibank via le Niger.
La Sonibank (Société nigérienne de banque) est le plus gros établissement financier public du pays. Du coup, son état de santé est révélateur de celui du secteur bancaire nigérien dans son ensemble. Véritable poids lourd de celui-ci, la Sonibank connaît des difficultés depuis près de deux ans maintenant. En cause, les sanctions économiques qui ont suivi le coup d’état du 26 juillet 2023, et la crise de confiance des Nigériens vis-à-vis de ses capacités de fonctionnement.
Ces deux facteurs ont mené à une chute des liquidités de la Sonibank, la rendant incapable de satisfaire aux demandes de retrait d’espèces de ses clients, même si son patron, Aboubacar Hamidine, préfère blâmer les arriérés de remboursement sur emprunts accordés aux titulaires de compte. Cela fait beaucoup à gérer pour la Sonibank, qui par ailleurs, comme ses consoeurs malienne et burkinabè, doit pouvoir répondre aux besoins en cash de la junte nigérienne.
Il est donc logique que cette dernière se soit sentie concernée dès l’instant où l’entité bancaire s’est retrouvée menacée sur un plan existentiel, au point d’initier directement des négociations auprès de la BOAD, en vue d’une injection d’argent frais. Rappelons qu’en tournant le dos aux Occidentaux et à leurs marchés financiers, les autorités de Niamey ne peuvent désormais dépendre que des solutions de financements nationales et sous-régionales.

Reste maintenant à savoir si cette bouée de sauvetage ne sera qu’un épisode passager pour le secteur bancaire nigérien, et, en particulier, pour la Sonibank, qui, pour beaucoup de Nigériens, n’est qu’une énième victime de l’enrichissement illicite dans leur pays. En effet, plusieurs de ses clients seraient devenus insolvables après avoir été écartés du sérail, d’où la multiplication des appels populaires à la justice pour traiter radicalement toute forme de délinquance financière.
Paul-Patrick Tédga
MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)