BURUNDI : Un pays qui sombre petit à petit vers le chaos et la dictature

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« En deux ans, le manque de fermeté de la communauté internationale et son incapacité à mettre en oeuvre ses propres décisions – notamment les mesures de protection des populations civiles et la relance du dialogue politique – auront permis au président (Pierre) Nkurunziza de remodeler en profondeur le paysage politique, sécuritaire et social du Burundi », a estimé la FIDH (Fédération internationale des droits de l’homme), dans un rapport d’une quarantaine de pages écrit avec l’aide d’organisations partenaires locales.

« Le régime burundais est en train de s’ériger en dictature », a souligné la FIDH, rappelant que le Burundi traverse une crise violente depuis la décision en avril 2015 de Pierre Nkurunziza (sur notre photo avec son épouse Denise Nkurunziza) de briguer un troisième mandat controversé, obtenu en juillet de la même année.

Des manifestations avaient alors été, violemment, réprimées et un coup d’état manqué en mai 2015 a fait basculer le pouvoir dans une répression systématique. L’ONU et des organisations de défense des droits de l’homme ont, depuis, accusé Bujumbura de graves violations des droits et mis en garde contre un risque de génocide.

Le gouvernement burundais a, jusqu’à présent, toujours, réfuté ces accusations, les qualifiant, notamment, de « tentative de division du peuple burundais », de « fabrication » et de « médisance ».
« Le paysage politique s’est resserré autour d’un parti-unique, le CNDD-FDD, devenu également un parti-Etat. Un culte du parti et de la personnalité du président a été mis en place. Des monuments à la gloire du CNDD-FDD se multiplient aux quatre coins du pays », commente la FIDH, selon laquelle des drapeaux du CNDD-FDD sont hissés devant des écoles publiques.

La FIDH critique, également, un projet de modification de la Constitution faisant sauter la limite des mandats présidentiels, qui, s’il aboutissait, « aurait pour conséquence probable l’établissement d’un régime autocratique voire d’une dictature durable au Burundi ».

« Une campagne de répression violente de tous les présumés opposants », parfois même, jusqu’au sein du parti au pouvoir, est, également, dénoncée par la FIDH. Cette campagne est exécutée avec l’aide des services de sécurité et des Imbonerakure, la ligue des jeunes du CNDD-FDD, qualifiée de milice par l’ONU et qui se militarise de plus en plus, affirme la FIDH.

« Une propagande violente, aux accents guerriers, est diffusée sur l’ensemble du territoire », appelant à « se tenir prêt à combattre les opposants, voire, à les éliminer », ajoute-t-elle.

Selon la FIDH, la crise a fait à ce jour plus de 1.200 morts, de 400 à 900 disparus, 10.000 personnes détenues pour des motifs politiques et a poussé plus de 400.000 personnes à l’exil.
La FIDH regrette, par ailleurs, l' »anéantissement » de la liberté d’expression et d’opinion, l’utilisation du système judiciaire comme outil de répression, et réitère sa mise en garde contre la stigmatisation de la minorité tutsi. « Les autorités les accusent de vouloir reprendre le pouvoir à la majorité hutu », dont est issu le président, estime-t-elle.

A ce titre, la FIDH évoque une « campagne de purge » au sein de l’armée burundaise, visant, principalement, les soldats de l’ancienne armée burundaise à dominante tutsi (FAB), victimes selon elle d’arrestations arbitraires, actes de torture et assassinats.

Cette « campagne d’épuration » renforce, selon la FIDH les « tensions politico-ethniques au sein de l’armée » et remet « en cause les équilibres ethniques issus de l’Accord d’Arusha » ayant permis de mettre fin à la guerre civile (1993-2006).

L’ONG appelle, dès lors, la communauté internationale à agir, notamment, via le déploiement d’une force de 228 policiers onusiens, la création d’une force Union africaine (UA)-ONU chargée de la protection des civils, ou encore, des sanctions ciblées incluant des gels d’avoirs et des interdictions de voyager pour les responsables gouvernementaux.

Elle appelle, également, la Cour pénale internationale (CPI) à ouvrir une enquête avant octobre 2017, date à laquelle deviendra effectif le retrait du Burundi de cette institution.

Avec AFP

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