CENTRAFRIQUE : La condition des détenus dans l’enfer de Ngaragba

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La prison centrale de Ngaragba située dans le 7ème arrondissement de la ville de Bangui a été conçue en 1947 pour accueillir 400 détenus. Elle en abrite actuellement 700. Voire plus.

Dans les années 60 et 70, cette prison, la plus importante de Centrafrique qui compte 38 maisons d’arrêt, a acquis une fâcheuse réputation. Elle a accueilli des prisonniers de droit commun, mais également, des personnes en délicatesse avec le pouvoir en place. Certains détenus politiques y ont été torturés et y ont perdu la vie. D’autres y ont fait des séjours à répétition alternant périodes d’incarcération et libérations au gré des caprices du pouvoir. En 1979, 26 écoliers y mourront.
 
Aujourd’hui, les conditions d’incarcération à Ngaragba font l’objet de la part des observateurs des droits humains de vives critiques : surpopulation, couchage à même le sol, nourriture insuffisante, défaut de surveillance, mauvais traitements, personnels peu formés. Par.ailleurs, une majorité de personnes sont en détention provisoire dans l’attente d’un jugement. 

La Minusca et le cardinal archevêque de Bangui, Dieudonné Nzapalainga, se sont, à plusieurs reprises, émus des conditions de détention dans les maisons d’arrêt centrafricaines. Le 22 avril 2015, le cardinal archevêque de Bangui a fait distribuer des nattes aux détenus de la prison de Ngaragba qui s’allongeaient à même le sol. En 2019, il a offert des repas aux prisonniers (sur notre photo, en prélude à la fête de Pâques qui sera célébrée le dimanche 16 avril 2017, le cardinal Nzapalainga a célébré le Jeudi Saint avec les prisonniers de la Maison d’Arrêt de Ngaragba).

 La prison de Ngaragba fait aujourd’hui les frais du manque de places dans les autres maisons d’arrêt de la République centrafricaine et du contexte actuel de violences qui conduit à une augmentation considérable  du nombre des détenus. 

Les critiques concernant Ngaragba dénoncent la promiscuité, la cohabitation entre jeunes et détenus plus âgés, entre petits délinquants et et auteurs de crimes, le défaut d’entretien des bâtiments (cellules inondées par les eaux de pluie), la présence de nuisibles (punaises, moustiques, rats . . .).

Enfin, cette suroccupation pose de sérieux problèmes au regard des risques de pandémie du coronavirus. Plusieurs détenus ont été testés positifs. La MINUSCA a dû fournir à la prison de Ngaragba du matériel et des équipements pour lutter contre le COVID 19.

Les organisations de défense des droits humains appellent à une amélioration de la condition des détenus dans les prisons centrafricaines, sans se faire trop d’illusions sur une improbable réforme pénitentiaire. 

Cette réforme n’est pas à  l’ordre du jour pour un gouvernement centrafricain quelque peu dépassé par la situation : 80 % du territoire national est occupé par les milices, l’économie est dévastée. . .
Lutter contre l’impunité et défendre la condition des détenus font partie d’un même combat, celui de la protection des droits humains.

Patrick David 
Docteur en droit 

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