GUINEE BISSAU : L’Union européenne indifférente à la confiscation de la démocratie par Umaro Cissoko Embalo

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L’Union européenne (UE) veut approfondir ses liens avec la Guinée Bissau. Son président, Umaro Cissoko Embalo, qui ne demandait pas mieux, s’est entretenu ce 5 mai à ce sujet avec une délégation du Bloc des 27 dirigée par Rita Laranjinha. Ce déplacement des Européens fait suite à la prorogation des accords de pêche entre les deux parties. Alors que la démocratie a été prise en otage dans la nation lusophone, l’UE joue la carte de l’indifférence totale. En réalité, son choix est tristement égoïste car il préserve, uniquement, ses seuls et uniques intérêts devant un dictateur qui cherche à se maintenir au pouvoir en muselant son peuple, et ignore totalement ses valeurs de démocratie et de liberté qu’elle diffuse à travers le monde et qu’elle n’applique pas en Guinée Bissau.

La débâcle enregistrée par la CEDEAO lors d’une mission de réconciliation des acteurs politiques bissau-guinéens en février dernier aura été ignorée par le Bloc de l’UE. Venus assurer la médiation entre le gouvernement de Bissau et les partis d’opposition locaux, les officiels de l’organe sous-régional avaient été priés de s’en aller parce qu’ils remettaient en question la légitimité de la décision d’Umaro Cissoko Embalo de demeurer président, au delà de son terme (sur notre photo, le président bissau-guinéen avec la délégation de l’Union européenne avec à sa droite, Rita Laranjinha visiblement contente d’être aux côtés du dictateur).

Un constat évident au vu des subterfuges commandités par ce dernier afin de paralyser le fonctionnement des institutions de la Guinée Bissau, et que partagent tant l’opposition nationale que la communauté internationale. Assumant pleinement le renvoi du staff de la CEDEAO, le dirigeant bissau-guinéen avait justifié, lors d’une interview télé, sa décision par le soi-disant activisme politique des officiels missionnés en question, sans en apporter la moindre preuve.

Il est paradoxal qu’en dépit d’une telle comédie politique, pourtant largement médiatisée, l’UE se désintéresse de l’état du climat démocratique dans cette petite nation au point de renouveler le partenariat halieutique les liant depuis 2019. Les 27 Etats membres se seraient-ils retrouvés dos au mur après avoir renoncé à proroger des accords du même type avec le Sénégal ? En tout cas, ce sont 100 millions d’euros qui devraient entrer dans les coffres de l’Etat de Guinée Bissau.  

Mais où ira tout cet argent avec un protagoniste comme Umaro Cissoko Embalo aux manettes, qui n’a rien fait de bon avec les fonds perçus lors des cinq premières années dudit accord ? Malgré lui, les Bissau-Guinéens ne reçoivent que 3% des prises des navires de l’UE pour leur propre consommation. Comme pendant la première période, on peut supposer que s’il est réélu, les recettes de la seconde période financeront ses voyages et la corruption des élites locales.

Paul-Patrick Tédga

MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)

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