MA RENCONTRE AVEC SASSOU : Me Massengo-Tiassé dit tout ce qui s’est passé

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Le 2e vice-président de la Commission nationale des droits de l’homme du Congo, Me Maurice Massengo-Tiassé, a, longuement, rencontré le président, Denis Sassou Nguesso, dans la soirée du samedi saint 19 avril, à la résidence du Plateau. Des retrouvailles assez particulières parce que la politique et les droits de l’homme, ne font pas toujours bon ménage, au Congo. Dans tous les cas, il était utile que les deux hommes se parlent, après dix ans sans se voir. Ils ont, tellement, à se dire qu’ils se retrouveront, dès le retour, au Congo, de Me Tiassé, après l’accord de ses médecins français, qui le suivent, actuellement. Le Congo étant un pays de mystères, cet entretien a, diversement, été interprété. Beaucoup de choses se disent, et même des personnes de bonne foi, s’interrogent. C’est pour ne pas enflammer la rumeur publique que Me Tiassé livre ses propos, en guise de droit de réponse.

AFRIQUEDUCATION : Des rumeurs surprenantes et inquiétantes circulent à votre sujet sur internet ainsi que dans les milieux congolais depuis quelques jours, comme en témoigne la dépêche du 30 avril dernier sur le site Brazza-news. Celle-ci annonce en titre la chose suivante : « Changement de la constitution : Me Massengo-Tiassé hier opposant a été corrompu et devient un traître ». Son contenu est encore plus alarmant, il affirme la chose suivante : « L’interdiction de sortie du territoire congolais fait à Tiassé avait suscité beaucoup d’émoi en décembre de l’an dernier. La stupéfaction de beaucoup de Congolais aujourd’hui du revirement de Tiassé contre ses défenseurs d’hier n’arrête pas de faire couler des salives. En effet, reçu par le président de la République aux environs du 20 avril dernier, l’avocat n’a voulu revoir aucun des soutiens de sa traversée du désert. Par contre, il ne cache pas qu’il a reçu de l’argent du président, il a même décalé son voyage sur Paris de plusieurs jours pour l’aménagement de la salle de conférence du bâtiment qui abrite sa station de télé en l’équipant de Split, de caméras et de lumières. Même aménagement de la cafétéria dorénavant équipée d’un nouveau congélateur et de matériels de cuisine ainsi que l’achat d’un groupe électrogène, d’écrans plasma… Mais pour quoi se cacher de ses soutiens d’hier… Massengo serait ressorti de la présidence avec plusieurs dizaines de millions ( de F CFA, ndlr), est-ce la raison qui l’a poussé à repartir en catimini hier soir (28 avril, ndlr), à Paris, sans dire au revoir et n’a même pas voulu que le protocole de la Commission nationale des droits de l’homme dont il est encore le deuxième vice-président s’occupe des formalités de son voyage ? Quel Congolais oubliera le livre au ton acerbe écrit par lui contre Sassou ? Est-ce que Sassou refera confiance après que Tiassé l’ait sacqué à degré de haut dégoût ? A suivre… » (fin de citation). Voilà ce qui est dit sur vous, en ce moment. Il s’agit d’accusations précises sans équivoque. Sont-elles vraies ? Exagérées ? Où se situe exactement la vérité ? Dites-nous tout.

Me Maurice Massengo-Tiassé : Commençons par le début afin d’apporter un maximum d’éclairage à cette affaire, qui n’aurait jamais eu lieu si les uns et les autres avaient un minimum de bon sens. Le 5 janvier 2014, en tant que membre des corps constitués de la République du Congo, en ma qualité de 2 e vice-président de la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH), je reçois une invitation du protocole d’Etat pour la cérémonie de présentation des vœux à Monsieur le président de la République et Madame. Le 6 janvier 2014, j’interroge Me Jean Martin Mbemba, le président de la CNDH, pour savoir ce qu’il y a lieu de faire. Malgré mon état de santé, il me demande de prendre part à ladite cérémonie. J’accepte, d’autant plus que Me Mbemba s’est vu retirer sa carte d’invitation à cette cérémonie des vœux, par la direction du protocole d’Etat qui ne souhaitait pas, pour d’autres raisons, qu’il se retrouve en face du président de la République.

C’est pendant cette cérémonie que le président de la République, après m’avoir serré la main, m’invite à m’entretenir plus tard avec lui. Le président avait ajouté que je ne devais pas sortir du pays sans l’avoir vu au préalable. C’était donc important de le rencontrer. N’obtenant pas d’audience et voyant arriver le jour de mes rendez- vous médicaux à l’étranger, j’ai décidé de partir fin janvier après avoir pris le soin d’écrire au chef de l’Etat, pour lui proposer de remettre notre entretien, à mon retour, des soins.

J’ai donc écrit le 14 janvier, au président de la République, (je préfère me répéter pour me faire bien comprendre) pour lui proposer que notre rencontre se déroule après mes soins à l’étranger, en mars ou en avril 2014.

La première dame, Madame Antoinette Sassou Nguesso, qui avait, de son côté, exprimé le souhait de me recevoir avant son époux, a reçu également un courrier de ma part dans ce sens. Voilà pourquoi, le 18 janvier 2014, j’ai voulu quitter le Congo. Malheureusement, je n’ai pu accéder à l’avion après l’enregistrement de mes bagages, mes formalités ayant été stoppées au contrôle de police. J’ai été choqué par cette interdiction bien que, je l’admets, je n’en ai pas vraiment été surpris dans la mesure où le président m’avait clairement mis en garde.

Bref, trois mois de longue attente, de stress, de silence, de méditation et, surtout, de détermination, suite à mes nombreux contacts avec le ministre de l’Intérieur (Raymond Mboulou, ndlr), que je remercie en passant, je suis finalement reçu par le Président de la République pendant de longues heures.

Au cours de ce long échange, j’avais eu à cœur de soulever deux points importants.

Le premier, j’ai repris, à mon compte, les revendications des auditrices et auditeurs de la Radio Forum et des citoyens de la rue. Car, pour moi, c’était la bonne occasion pour présenter le vrai visage du Congo et les préoccupations des Congolais qui souffrent des inégalités et croupissent dans la misère, directement, au premier d’entre eux. Je l’ai fait grâce à ma casquette de spécialiste des droits de l’homme et, surtout, parce que c’est de mon devoir de rappeler au président de la République son devoir de garantir la permanence des valeurs de notre société dans l’unité nationale. En toute liberté, j’ai donc insisté sur les nombreuses frustrations des Congolais. Le président Sassou Nguesso, en tant que chef de l’Etat, est le seul garant de l’unité nationale. C’est lui qui doit mettre fin à l’arrogance, à l’embourgeoisement de certains cadres du pays, et à la pauvreté croissante de la population. La seule façon, pour moi, de préserver l’unité et la paix dans le pays, c’est de faire respecter la loi qui est la même, pour tous. Voilà pourquoi je n’ai pas hésité à m’entretenir avec le chef de l’Etat sur toutes les atteintes aux droits de l’homme que nous connaissons au Congo, ce qui relève de ma mission, à savoir les dénoncer, publiquement, en rappelant, constamment, les principes de la République. Ceux qui doivent en faire l’application, sont ceux qui disposent de l’autorité de l’Etat : les ministres, les maires, les préfets, que je n’ai pas hésité à dénoncer quand j’avais connaissance de certaines pratiques déviantes. Le chef de l’Etat m’a écouté sans m’interrompre.

Mon éducation d’homme du Barreau et de défenseur des droits de l’homme m’astreint à une obligation de réserve. C’est au président et au chef de l’Etat, seul, qu’il revient de rendre publique notre longue conversation. Rien ne sortira de moi, même si tout le monde cherche à savoir le pourquoi et le comment de notre long échange. Certains sont tellement aux abois qu’ils vont jusqu’à dire n’importe quoi sur cette audience. Nous n’avons pas parlé de la constitution. J’insiste que notre échange a eu lieu, uniquement, entre le président de la République et moi. Personne d’autre, je dis bien, personne, n’y a assisté, ni de près, ni de loin. J’ai évoqué toutes sortes de questions, allant du mauvais traitement de nos artistes musiciens congolais à la gestion discriminatoire du marché total de Bacongo. Il en est de même de l’érection, au rond point du Marché Commission, de la stèle du 3 novembre 1993 prévue dans les engagements du Forum pour la réconciliation et la reconstruction du Congo, en janvier 1998.

Ma deuxième préoccupation était d’évoquer les privations des droits de certaines personnalités comme Me Moudileno Massengo qui ne perçoit plus sa rente viagère d’ancien vice- président du conseil d’Etat assimilé au premier ministre, et Me Hervé Malonga qui n’arrive pas à toucher ses honoraires d’ancien avocat de l’Etat. Toutes ces questions, et beaucoup d’autres, ont été renvoyées à une rencontre ultérieure, après mes soins. Car le président s’est montré soucieux de mon état de santé qu’il a jugé être la priorité. Il m’a demandé de prendre contact avec le ministre de l’Intérieur pour me remettre les frais de transport et de soins. Cet argent converti en euros, qui devait également, couvrir mon voyage (puisque mon billet retour n’était plus valable), loin d’être les F CFA dans les nguiris, a suffi dans les deux poches intérieures de ma veste. Je tiens à préciser que le président de la République m’a confirmé n’avoir jamais reçu ma demande d’aide médicale transmise par le bureau de la CNDH en décembre 2012. Il a d’ailleurs, regretté cela. C’est pourquoi il m’a assuré de son assistance sanitaire.

En me remettant cette subvention sanitaire qui est réglementaire pour tous les corps constitués de la République, le chef de l’Etat n’a fait que réparer le préjudice que j’ai subi, d’abord, depuis décembre 2012, et surtout, suite à cette longue attente, sans suivi médical.

Mon passeport ordinaire n’a été établi que le jour de mon voyage, le 28 avril 2014 (voir fac-similé), grâce à l’implication personnelle du ministre de l’Intérieur. Jusqu’à 16 h 30, je ne l’avais pas encore. Il faut signaler que malgré ma rencontre avec le ministre des Affaires étrangères, Basile Ikouébé, je n’ai pas réussi à me faire établir ou renouveler mon passeport diplomatique qui était expiré, depuis quelques mois. Je ne pouvais, donc pas prétendre à un service de protocole de la CNDH. En tout état de cause, ce service n’était pas justifié étant donné que mon déplacement était privé.

Je regrette les élucubrations de mauvais goût, à mon endroit, d’une personne en mal de célébrité. En effet, cette journaliste flambeuse, qui a fait des révélations fallacieuses, est la même qui a fait des pieds et des mains pour chercher à renforcer l’équipe du Forum. Est-ce parce que je n’ai pas répondu à ses sollicitations et à sa volonté de vivre dans le bâtiment du Forum, qui l’aurait poussé à la désinformation dont je fais l’objet de sa part ? Tout le monde sait que nous avons actuellement des difficultés pour rendre réguliers nos programmes à cause du groupe électrogène de 25 Kva qui a été saboté, en février dernier, et qui tombe, de ce fait, très souvent en panne. Cela dit, nous n’avons jamais changé notre ligne éditoriale. Si certains Congolais ont peut-être peur d’exprimer leurs idées, nous, au Forum, ne censurons personne.

A ce sujet, si j’avais reçu les millions de F CFA dans les sacs dits « nguiris », j’allais, immédiatement, acheter un groupe électrogène de plus de 50 kva nécessaires au fonctionnement des émetteurs du groupe Forum Radio Télévision des Droits de l’Homme.

J’ai, donc, réglé mon billet à l’agence Air France, en classe affaires, directement en euros. Je me suis également permis d’acheter des carreaux, pour l’espace Emile Cardinal Biayenda, qui est dans l’enceinte du Centre panafricain des droits de l’homme. Lors de l’inauguration de ce lieu de recueillement le samedi 22 mars 2014, beaucoup de personnes, avaient souhaité qu’on y place des carreaux. C’est ce que j’ai fait. J’ai aussi changé deux splits, l’un dans mon bureau, et l’autre dans la salle des banquets, ainsi que le frigo de la cafétéria qui était déjà équipée, comme peuvent en témoigner certainement, les militants des partis politiques qui ont tenu leurs réunions dans cette salle de conférence avant ma rencontre avec le président. C’est faux et archi faux, nous n’avons pas acheté un nouveau groupe électrogène, le petit groupe de 5kva et le frigo ont été achetés bien avant la rencontre avec le président, en février 2014, lors de l’ouverture de la cafétéria. C’est toujours les mêmes jaloux et haineux qui véhiculent les insanités sur mon patrimoine et celui du groupe Forum Radio Télévision des Droits de l’Homme. Ces individus ne me détourneront jamais de ma mission, celle de défendre les droits de l’homme.

A la CNDH, comme au Forum, je cherche à faire appliquer les normes relatives aux droits de l’homme dans la vie quotidienne de tous les Congolais où qu’ils se trouvent. Pour y parvenir, nous devons, absolument, collaborer avec le gouvernement, les autorités judiciaires, les parlementaires et la force publique. A la radio Forum, nous conférons aux individus, l’autonomie nécessaire pour revendiquer leurs droits afin d’aider l’Etat à honorer ses obligations qui lui incombent en matière des droits de l’homme.

En tant que partenaires de premier plan, nous, défenseurs des droits de l’homme, devrions attirer l’attention du gouvernement, et particulièrement, du chef de l’Etat, sur les violations des droits de l’homme. C’est pourquoi j’ai exprimé la voix des Sans Voix, en défendant les victimes. Je ne pouvais, donc, pas rater cette belle occasion de rencontrer le président, pour évoquer certaines situations et la frustration des Congolais. Malheureusement, tout n’a pas été dit et épuisé compte tenu du temps limité par mon état de santé. Une suite à notre entretien est prévue après mes soins en France.

Inch’Allah !

Avez-vous parlé de l’après 2016 ?

Vous me posez la question de savoir si nous avons abordé la question de la révision de la constitution, je vous dis encore une fois non et non.

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