S’il y avait une infime chance pour que les autorités judiciaires françaises acceptent d’extrader Halima Ben Ali, la fille de l’ancien président, Zine El Abidine Ben Ali, en réponse à une requête formulée par leurs consoeurs tunisiennes, la condamnation à mort de Saber Chouchen vient de l’enterrer, même s’il a finalement été libéré le 6 octobre soir. La justice tunisienne montre qu’elle est aux ordres. En effet, la question de l’indépendance de la justice tunisienne vient, à peine, d’être posée dans l’Hexagone que la réponse lui tombe directement du ciel.
Chouchen, un Tunisien de 51 ans, a écopé de la peine capitale pour avoir, prétendument, tenu sur son compte Facebook des propos offensants envers son président. Tombé sous le coup de la loi contre la cybercriminalité, il fut emprisonné en janvier 2024 et attendait depuis de connaître son sort. Son avocat estime que les intentions prêtées à son client sont fausses, et que l’impact des publications de celui-ci est dérisoire, compte tenu de sa faible influence sur la toile (sur notre photo, Miss Halima Ben Ali dont le pouvoir tunisien réclame l’extradition. En vain pour le moment).
Il est tellement désolant de voir Kaïs Saïed utiliser le système judiciaire de son pays pour réprimer ses propres concitoyens pour une histoire de publications sur les réseaux sociaux. Tous les Tunisiens attendaient de le voir à l’œuvre, non seulement, juste après les incidents du 8 et 9 septembre derniers relatifs aux attaques de drone sur la flottille pour Gaza présente dans un des ports du pays, mais aussi, et surtout, après que l’implication d’Israël ait été confirmée par la suite.
En effet, c’est Thomas Barrack, ambassadeur des Etats-Unis en Turquie et envoyé spécial de la Maison Blanche en Syrie, qui l’a déclaré lors d’une interview télévisée le 23 septembre. Benyamin Netanyahu ayant personnellement donné l’ordre de frapper la Tunisie, un sous-marin hébreu a été servi de base de lancement des drones, qui ont fait les dégâts que l’on connaît. Quelle a été la réaction de Tunis face à cet acte de violation totale de sa souveraineté ? Aucune !

C’est plutôt sur des inepties locales que Kaïs Saïed préfère s’attarder et étaler son autorité. Même si la justice a ordonné la libération de Chouchen, tout montre que la justice tunisienne est inquiétante car soumise aux injonctions du pouvoir politique. Dans un tel contexte, il est illusoire de penser que la France donnera suite à un quelconque besoin de justice des Tunisiens pour les détournements publics imputables à Ben Ali, même si un tel besoin était fondé. L’avocate d’Halima Ben Ali n’aura aucune difficulté à convaincre les procureurs français de relaxer sa cliente, sans oublier de remercier le juge tunisien à l’origine du scandale vis-à-vis de Chouchen.
Paul-Patrick Tédga
MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)