AFRIQUE DU SUD : Un compagnon de route de Mandela demande à Jacob Zuma de démissionner

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Ahmed Kathrada, un militant anti-apartheid, ancien compagnon de lutte de Nelson Mandela, a appelé, samedi, 2 avril, le président sud-africain, Jacob Zuma, reconnu coupable de violation de la Constitution, à démissionner. Le vétéran, dans un langage direct, ne passe par quatre chemins : « Aujourd’hui, je demande au président de se soumettre à la volonté du peuple et de démissionner », écrit Ahmed Kathrada, 86 ans, dans cette lettre ouverte, datée du 31 mars et publiée, ce samedi, dans les médias sud-africains.

Le vétéran, membre du Congrès national africain (ANC, au pouvoir), se joint au concert de critiques visant le chef d’Etat sud-africain et réclamant son départ. Ces appels à la démission font suite à l’arrêt historique rendu, jeudi, 31 mars, par la Cour constitutionnelle, et estimant que Jacob Zuma n’avait « pas respecté la constitution » en refusant de rembourser à l’Etat des frais de rénovation de sa propriété privée de Nkandla, dans l’Est du pays.

La semaine dernière, c’est le Umkhonte we Sizwe (Groupe de vétérans de la branche armée de l’ANC), qui avait demandé sa démission.

Zuma, qui a, longtemps, nié toute irrégularité dans le financement public de ces travaux estimés, en 2014, à 216 millions de rands (24 millions de dollars à l’époque), a fini par s’excuser, vendredi, 1er avril, soir, dans un discours télévisé à la nation, d’avoir eu recours aux fonds publics, reconnaissant avoir commis une faute constitutionnelle. Avant, il niait tout en bloc et avait fait subir des pressions énormes à la médiatrice de la République qui soutenait le contraire.

Zuma a, également, promis de se conformer à l’arrêt et de rembourser les frais engagés à titre privé. La Cour a, en effet, jugé que la piscine, le poulailler, l’enclos pour bétail et le centre pour visiteurs du domaine de Nkandla, n’étaient, en rien, liés à la sécurité présidentielle.

Mais, comme il est né avant la honte, Zuma n’a pas osé parler de démission. Du moins, pas pour le moment. Dans sa légèreté habituelle, il s’est borné à reconnaître ses torts (qu’il niait hier), sans en tirer les conséquences qui se doivent, à savoir, sa démission. Zuma est un jouisseur, longtemps brimé par le régime de l’apartheid, qui, finalement, est parvenu à accéder au pouvoir, sans réel vision pour son peuple, et, totalement, ignorant du poids de la responsabilité de sa haute fonction. Jacob Zuma n’aurait, sans doute, pas fait scandale dans aucun autre pays d’Afrique, mais, en Afrique du Sud où la séparation des pouvoirs est de règle, il est sans cesse indexé par ses excès. Finalement, son départ du pouvoir ferait du bien à toute l’Afrique du Sud, du moment où c’est du côté de son mentor, Nelson Mandela, qu’on lui demande, maintenant, de quitter le poste. Son ex-épouse, Xhosazana Dlamini-Zuma, en poste à la présidence de la Commission africaine, à Addis Abeba, a décidé de ne pas briguer un deuxième mandat, en juillet prochain. Sans doute, voudrait-elle ne pas rater l’opportunité d’une fin de mandat calamiteuse de Jacob, pour mieux se positionner. En tout cas, la fin (politique) de cet homme à femmes, risque d’être triste.

Question du vétéran Ahmed Kathrada à Jacob Zuma dans sa lettre ouverte : « Etes-vous conscient que votre contribution remarquable à la lutte de libération se trouverait, sérieusement, ternie si votre mandat comme président continuait à être marqué par des crises et une perte de confiance grandissante dans l’ANC et le gouvernement ? »

Ahmed Kathrada a rencontré Nelson Mandela, en 1952, et rejoint son combat contre les lois de l’apartheid. Avant sa libération, en octobre 1989, il a passé 26 ans en prison dont 18 dans celle de Robben Island, où Mandela a été détenu pendant 28 ans. Il a, donc, l’autorité morale nécessaire pour faire des leçons publiques à Zuma. Car il est un indigne président qui trahit, tous les jours que Dieu fait, la cause que défend l’ANC.

L’ANC est au pouvoir depuis la victoire de Nelson Mandela aux premières élections post-apartheid en 1994. Agé de 73 ans, Jacob Zuma reste (plus ou moins) soutenu par le parti anti-apartheid, bien qu’il traîne derrière lui toute une série de scandales. Son second mandat doit s’achever en 2019. Une fin de règne qui, assurément, sera triste, si on ne le fait pas partir avant.

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