MACRON A TEL AVIV : Un voyage de tous les dangers avec une voix inaudible

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Après sa ministre des Affaires étrangères, Catherine Colonna, il y a quelques jours, au Caire, où elle a participé au Sommet sur la crise en Israël, le Hamas et les Palestiniens, Sommet tenu après l’échec de celui que voulait organiser Joe Biden, à Amman, et qui devait regrouper le président égyptien, le roi de Jordanie et le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, le président, Emmanuel Macron, se rend, demain, mardi, 24 octobre, à Tel Aviv où il rencontrera les dirigeants israéliens dont le premier ministre, Benyamin Netanyahu.

A-t-il prévu un programme arabe dans son voyage ? Si oui, celui-ci, pour le moment, reste secret car il faut le dire, Emmanuel Macron, pendant ce voyage va marcher sur des oeufs. Pourquoi ? Parce que la France n’a plus de politique arabe crédible. Avant, c’est-à-dire, jusqu’à Jacques Chirac, la France se faisait passer comme l’amie d’Israël et l’ami des Arabes, plus précisément, de la Palestine. Elle était réellement perçue comme cela dans le monde arabe.

En 1982, malgré le fait qu’il avait une épouse juive (Danielle Mitterrand), le président, François Mitterrand, dans un discours resté mémorable à la Knesset (parlement monocaméral israélien) où en tant qu’ami d’Israël, il avait déclaré la position de la France pour une solution à deux Etats, rassemblant l’Etat d’Israël et un Etat palestinien vivant côte à côte, dans la paix et la sécurité. Cette voie de la sagesse que Mitterrand avait héritée de ses prédécesseurs fut poursuivie par Jacques Chirac pendant douze ans.

Et patatras, voilà, Nicolas Sarkozy qui arrive à l’Elysée en 2007 et nomme Bernard Kouchner au Quai d’Orsay. D’origine juive, ce duo (fatal à la solution à 2 Etats) a commencé par aligner la France sur l’atlantisme (de Bush) en suivant les positions américaines et en abandonnant la troisième voix, la voix singulière que portait la France, dans ce conflit. Pour couronner le tout, la France a intégré l’OTAN alors que le général de Gaulle inscrivait l’indépendance de la France en se mettant à l’écart des deux blocs Etats-Unis (OTAN) et Union Soviétique (Pacte de Varsovie). Conséquence, depuis Sarkozy, la France a perdu cette force qu’elle avait en parlant de façon neutre aux deux belligérants. Nous y sommes aujourd’hui. C’est pourquoi on peut se demander ce que Macron pourra, concrètement, faire pendant ce voyage sinon s’aligner derrière Israël. Aura-t-il, suffisamment, de couilles pour aller en Cisjordanie afin de rencontrer Mahmoud Abbas (que voulait voir Joe Biden et que Antony Blinken a rencontré à Ramallah) ?

On ne tardera pas à le savoir mais déjà, Catherine Colonna lors de son voyage en Israël avait soigneusement évité Gaza et la Cisjordanie, y compris dans les discours et interviews. Sauf quand il fallait condamner les attaques du Hamas. Pas plus tard que la semaine dernière, Emmanuel Macron affirmait qu’il n’irait en Israël que si son voyage est « utile ». Pour l’heure, on cherche en quoi ce voyage pourrait l’être sans voir comment. Très affaiblie dans les capitales arabes (on manifeste régulièrement devant les ambassades de France à Tunis, à Beyrouth, etc.), la France n’est plus porteuse de cette diplomatie audible, originale, crédible qu’on lui connaissait dans cette partie du monde. On est vraiment très loin des envolées lyriques de Dominique de Villepin aux Nations-Unies pour contrer le sectarisme de Washington. La diplomatie française dans le dossier israélo-palestinien a été plombée par Sarkozy et Kouchner (dont personne n’entend parler depuis le 7 octobre). Ils sont étrangement muets. Il faudrait absolument que les journalistes aillent les déloger de là où ils se cachent. Après l’Américain, Joe Biden, l’Allemand, Olaf Scholz, le Britannique, Rishi Sunak, le Français va faire de la figuration dans la région au risque d’accroître les polémiques en France où la première communauté arabe d’Europe et la troisième communauté juive d’Europe, se regardent en chiens de faïence en attendant de s’écharper un jour, ce qui n’est plus une hypothèse d’école. Voilà pourquoi il faut avoir le courage de préparer, dès maintenant, l’après conflit entre Israël et le Hamas et désamorcer l’action de ceux en Iran, dans le Hezbollaz et le Hamas, qui crient à l’effacement d’Israël de la carte du Moyen-Orient.

Il faut dès maintenant préparer la phase politique consacrée par la solution à deux Etats (avec ou sans Mahmoud Abbas) en n’écoutant plus ceux qui ont emmené le processus de paix dans le mur, à savoir, Netanyahu et ses amis d’extrême-droite. Si le président français pouvait avoir les couilles en disant clairement les choses de cette façon pendant son voyage, il aurait droit à ce qu’on lui déroule le tapis rouge à son retour en France.

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